Sunday, November 04, 2007

MEMORANDUM DES COMMUNAUTES HUTU ET TUTSI DU NORD-KIVU

MEMORANDUM DES COMMUNAUTES HUTU ET TUTSI DU NORD-KIVU

A LA COMMISSION D'ENQUETE SUR LES MASSACRES DE WALIKALE, MASISI ET BWITO (RUTSHURU) EN MARS ET AVRIL 1993.

Photo: De gauche à droite: Christophe Barigereka, Stanislas Gatabazi Murayi et Athanase Bizige

Introduction.

C'est avec soulagement que nous, Communautés Zaïroises HUTU et TUTSI du Nord-Kivu, avons appris l'arrivée d'une commission d'enquëte sur les massacres perpétrés dans les Zones de Walikale, Masisi et dans la Collectivité de Bwito en Zone de Rutshuru durant les mois de mars et avril 1993 à notre endroit par les ethnies HUNDE et NYANGA.
Nous espérons que votre présence parmi nous vous permettra de saisir la portée exacte de ces massacres, d'en dégager les responsabilités et de tout faire pour y mettre fin le plus rapidement possible.
Dans ce mémorandum, nous essaierons de vous présenter la situation qui nous préoccupe en six volets, à savoir:
1- Bref aperçu historique sur la présence des ethnies Hutu et Tutsi au Nord-Kivu. 2- Causes profondes de la difficile cohabitation entre les différentes ethnies. 3- Montage du complot des massacres actuels.
4- Exécution du plan monté pour massacrer les Hutu et Tutsi. 5- Conclusion.
6- Annexes.


1. BREF APERCU HISTORIQUE SUR LA PRESENCE DES HUTU ET TUTSI AU NORD-KIVU.


a. HUTU ET TUTSI AUTOCHTONES

L'histoire démontre qu'en dehors des pygmées, toutes les autres ethnies ajourd'hui zaïroises sont arrivées au Zaïre par vagues successives d'immigration, à différentes périodes. A cet égard, aucune ethnie, aucune tribu ne peut revendiquer pour elle seule la Patrie Zaïroise et à l'inverse ne peut légitimement en exclure une autre.

Historiquement, les HUTU et TUTSI peuplent le Nord-Kivu (Masisi, Goma, Rutshuru) dès le 16e siècle. Les HUNDE et NANDE y font leur entrée aux 17e et 18e siècles venant de l'Uganda.


Suivons ce que disent les historiens à ce sujet:
Dans une étude publiée en1955 par CEPSI à Elisabethville, l'Abbé Gaspard KAJIGA de Goma écrit: "Cependant, la véritable immigration rwandaise (en direction du Zaïre) ne commence que vers la fin du 17e siècle. L'installation se fait dans le BUKUMU (GOMA), le BWISHA, le BWITO (RUTSHURU), le KAMURONZI, le GISHARI, le MUVUNYI (CORRECT ?), les MOKOTO (MASISI), l'Ile IDJWI et le BUZI (KALEHE), si bien qu'à la fin du 19e siècle sous Kigeri IV Rwabugiri, tout RUTSHURU, tout GOMA, une grande partie de MASISI, l'Ile IDJWI et la Chefferie BUZI (Kalehe) sont des territoires rwandais et paient tribut au monarque Rwanda.
Dans un ouvrage intitulé "RWANDA ANCIEN", le Chanoine L. LAGGER (1939) s'exprime en ces termes: "Le Rwanda perd le Bufumbira au profit de l'Ouganda, le Bwishya (Zone de Rutshuru), le Gishari (Zone de Masisi) et l'Ile Idjwi au profit du Congo Belge".

Abondant dans le même sens, R. BOURGEOIS écrit: "Suite aux accords internationaux de 1912, YUHI MUSINGA (Monarque du Rwanda) perdit des provinces entières où l'on parlait le Kinyarwanda: le Bufumbira et le Kigezi passèrent aux Anglais tandis que les Belges recevaient Djomba et le Bwisha (Rutshuru), le Kamuronzi (Masisi) le Bukumu (Goma) et le Gishari (Masisi); en outre la Belgique (MANQUE UN MOT ?) encore l'Ile Idjwi, conquëte récente de RWABUGIRI.

Dans sa lettre du 16 novembre 1956 écrite à Burungu et adressée à Monsieur le Commissaire de District du Nord-Kivu, le Grand Notable BULENDA Petro écrit ce qui suit: "Avant l'arrivée de l'immigration dans le Gishari, nous avions déjà des Banyarwanda dans le Gishari (270 à Karonge, 300 à Nyamitaba, 400 à Katovu.(IL MANQUE PEUT-ETRE QUELQUES MOTS).
Dans le Manifeste des Chefs de Groupements WASHALI-MOKOTO, WASHALIBAPFUNA, WASHALI-KAEMBE, rédigé et signé à MWESO le 30 octobre 1959, tous les Chefs des Groupements et tous les Notables précisent que "les Banyarwanda représentent 80% de la population vivant en harmonie avec eux depuis plus d'un demisiècle (60 à 70 ans)", donc depuis les années 1880.



b. IMPLANTATION D'AUTRES HUTU ET TUTSI AU NORD-KIVU

Contrairement à ce qui s'est passé le long des autres frontières nationales de notre pays, à l'Est, le Congo Belge et le Ruanda-Urundi ont partagé une mëme administration coloniale. Celle-ci, pour diverses raisons, organisa une transplantation des Hutu et Tutsi du Rwanda pour les installer définitivement dans les Zones de Masisi et Rutsuru au Bwito. Ces personnes déplacées par le pouvoir colonial rompaient ainsi avec leur ancien territoire car à la traversée de la frontière, on leur retirait d'abord l'identité du Rwanda-Urundi et recevaient celle du Congo Belge, de ce fait ces gens étaient régi par les mëmes lois que les autres indigènes de la Colonie.


Ce mouvement a eu lieu entre 1927 et 1956.
A l'accession du Congo à la souveraineté nationale, le cas de ces transplantés n'est pas passé inaperçu. En effet, ils furent cédés au nouvel Etat indépendant comme tous les autres congolais et participèrent à la vie politique sans distinction aucune conformément à la loi fondamentale.
C'est ainsi que certains parmi eux participèrent à la Table Ronde de Bruxelles et occupèrent des fonctions politiques et administratives, à l'issu des élections législatives de 1960.
Signalons mëme qu'avant l'indépendance on trouve des Hutu et Tutsi dans tous les organes de l'administration coutumière et administrative. Parmi les transplantés qui ont occupé des fonctions importantes, on peut notamment citer:
· Mr Jean Népomucène RWIYEREKA, Ministre des Finances du 1er Gouvernement Provincial du Kivu, Inspecteur d'enseignement primaire.
· Mr Théodomir NZAMUKWEREKA, Enseignant à l'Ecole Normale Moyenne de Bobandana, Membre de la Table Ronde politique de Bruxelles.
· Mr Wilifrid BUCHYANAYANDI, Chef coutumier de la Chefferie Indigène de GISHARI.
· Mr Stanislas GATABAZI MURAYI, Membre du Collège Permanent.

La note de propagande de 1960 ci-jointe, diffusée par feu A. KALINDA, ancien Chef de Collectivité des Bahunde vous prouvera combien les Hunde, Nyanga, Hutu et Tutsi vivaient en symbiose depuis longtemps (Annexe n° 1).


c. ARRIVEE DES REFUGIES RWANDAIS

Vers la fin de l'année 1959 et au début de 1960, le Congo Belge accueille des réfugiés en provenance du Rwanda. Ceux-ci furent placés sous le contrôle du H.C.R. Ils furent installés à des endroits bien connus à travers le Nord-Kivu, notamment Bibwe et Ihula.


d. INFILTRES HUTU ET TUTSI

Depuis un certain temps, on parle de plus en plus des infiltrés comme si ce phénomène serait réservé aux seules zones de Masisi, Goma et Rutshuru alors que partout dans le monde, les pays limitrophes connaissent cette réalité. La question fondamentale que l'on se pose est celle de savoir pourquoi s'acherne-t-on à la Région des Volcans alors que du côté de Ruwenzori le mëme phénomène existe ???
Qui ignore que les KONJO de l'Ouganda de mëme souche que nos frères NANDE de Beni et Butembo font leur infiltration dans la Région de Ruwenzori voire dans la zone de Rutshuru sans aucun commentaire.


Dans tous les cas, un chef coutumier honnëte doit connaître tous ses sujets.


2. CAUSES PROFONDES DE LA DIFFICILE COHABITATION ENTRE LES
DIFFERENTES ETHNIES.

Alors qu'avant et juste après l'indépendance, les Hutu et Tutsi vivaient en symbiose avec les Nande, Hunde et Nyanga, la haine ne commence lentement mais sûrement à ëtre cultivée que vers 1962 lorsque débutent les poursuites des Hutu et Tutsi qui avaient soutenu les partis politiques nationalistes, tels que MNC/Lumumba et CEREA, lesquels partis se sont par la suite opposés à la création de la province du Nord-Kivu, à l'époque. On se souviendra que suite à cette opposition Goma et Rutshuru seront soumis au referendum tandis que Masisi fera partie intégrante de la nouvelle province du Nord-Kivu.

En guise de vengeance, le Gouvernement provincial installé à Kirotshe procède au lynchage (MOT CORRECT?) de tous les leaders nationalistes Hutu et Tutsi. Ceux-ci furent limogés de tous les postes qu'ils occupaient au sein de l'administration coutumière. C'est le début de ce qu'on a appelé à tort, le KANYARWANDA des années 1962-1964 (sic).

Avec la loi n° 72-002 du 05 janvier 1972, les esprits furent appaisés et le calme relatif régna au Nord-Kivu jusqu'en 1981 lorsque le Parlement vota la loi inique n° 81-002 du 29 juin 1981 sur la nationalité.

Malgré tout cela, la haine n'était pas du tout accentuée durant les années écoulées. Ce sont les débats de la CNS sur la question de nationalité qui avaient mis le feu aux poudres et fait déterrer la hache de guerre.
Ajoutons à cela, les conférences et meeting faits par les Conférenciers à leur retour en Région et ceux des mutuelles tribales des ethnies agresseuses.


3. MONTAGE DU COMPLOT.

Nous tenons à souligner à la commission que ce complot date du temps où le ViceGouverneur actuel, Mr BAMWISHO, était encore Commissaire du Peuple. Celui-ci avait d'ailleurs déclaré au cours de son interview au Journal JUA que "Le Rwanda n'a qu'à accepter le retour de ses ressortissants au lieu de les laisser errer à travers le monde comme des Palestiniens (cfr document en annexe).


a. Exclusion des Hutu et Tutsi de Masisi à la C.N.S.

Pendant que toutes les composantes ethniques du Nord-Kivu devaient participer à la Conférence Nationale, les autres tribus Nord-Kivu se liguèrent pour en exclure les Hutu et Tutsi de cette région. Ce forfait a été réalisé sous le haut patronage de l'autorité régionale.

b. Tribalisation de l'administration locale.

Malgré l'émiettement de l'administration locale, les Nande, Hunde et Nyanga se taillent la part du lion au détriment des autres ethnies.
Les Hunde et Nyanga qui représentent 8% de la population du Nord-Kivu occupent environ 48% de places au sein de la Territoriale tandis que les Hutu et Tutsi qui en représentent 50% n'occupent que 11% de places dans l'Administration Territoriale. (Annexe n°3).


c) Quadrillage militaire de la Région.

Plus particulièrement à Masisi, les sections de la Gendarmerie s'évaluent à plus de 10, ceci pour mieux atteindre l'objectif. Les gendarmes d'ethnies Hutu et Tutsi furent retirés de la zone de Masisi à la demande de la mutuelle Bushenge-Hunde au Lieutenant-Colonel OLEKO, Commandant de Bataillon (Annexe n° 4).
Il est bien clair que cette mise en place de l'armée préparait le génocide des Hutu et Tutsi car les massacres des personnes de ces ethnies ont été perpétrés par des civils HUNDE et NYANGA avec la participation de l'armée.



d) Le Vice-Gouverneur du Nord-Kivu, Mr BAMWISHO, serait commanditaire du
génocide. Son interview contenu dans l'annexe est une preuve éloquente que le génocide actuel des Hutu et Tutsi est une exécution d'un plan élaboré depuis de longues dates. Sa présence à la tête de la Région aurait également facilité l'exécution dudit programme.


Notons également la nomination du Capitaine MISINGI, sujet Hunde-Nyanga, à la tëte de la Gendarmerie de la Zone de Masisi. Ce dernier, grâce à ce poste militaire, administrait à son gré la Zone de Masisi au détriment du Commissaire de Zone (autorité civile).

Les massacres des Hutu et Tutsi se sont intensifiés après le passage du Gouverneur de Région du Nord-Kivu et de son Vice dans les les Zones de Masisi et Walikale.


4. EXECUTION DU PLAN MONTE POUR MASSACRER LES HUTU ET TUTSI.

L'exécution du plan est le résultat d'un programme lointain visant le maintien au pouvoir, sans partage, de nos adversaires politiques qui ont occupé tous les postes durant les 15 dernières années. Ce plan vise l'extermination des personnes et leurs biens pendant cette période de crise que traverse notre pays.


a) Les actes barbares de provocation.

· en juillet 1992, juste après le passage du Gouverneur de Région au Bwito, 550 vaches de M. Rusigariye sont exterminées par des Hunde;
· en mai 1992, trois Hutu sont assassinés par balles à Mahanga par MM. DIEGO, HAMULI et MUBAWA, tous trois d'ethnie Hunde. Les victimes sont SERUSHAGO, NSEKUYE et BAZIMENYERA, à quelques kilomètres de Masisi; · Les assassins sont arrëtés. Sur intervention du Vice-Gouverneur BAMWISHO, ils sont relâchés et jouissent actuellement de leur liberté;
· en février et mars 1992, dix Hutu sont tués aux environs de la bourgade de SAKE et plusieurs autres à divers endroits (Annexe n° 5b);
· en décembre 1992, plus de 700 vaches appartenant aux Hutu et Tutsi sont décimées à Mweso et Kitshanga et 115 autres d'un sujet Tutsi sont abattues à Nyamilima (en Zone de Rutshuru) par des Hunde et Nande;

· pendant toute cette période, les Autorités à tous les échelons procèdent aux brimades, arrestations arbitraires et infligent des taxes exagérées et sans quittances à la population Hutu et Tutsi;
· les gendarmes prêtent main forte à ces Autorités comme le prouvent les copies des plaintes adressées au Parquet de Goma en annexe qui sont souvent restées sans suite (Annexe n° 5).


b. Massacres à grande échelle.

Le coup d'envoi des massacres commence dans le grand marché de NTOTO (Zone de Walikale), le samedi 20 mars 1993, deux jours après le passage du Vice-Gouverneur et deux heures après celui du Commissaire de Zone assistant apparenté au ViceGouverneur. (Annexes n° 6, 7, 8, 9).
Tous les Hutu et Tutsi qui étaient venus au marché ont été fusillés, tués par coups de machettes, des flèches empoisonnées, etc ..., bref pas de survivants!
· Le lendemain dimanche 21 mars 1993, commence un véritable carnage. Les ponts en lianes sont coupés et on va de village en village tuant hommes, femmes et enfants et incendiant les maisons.
Les fidèles Hutu et Tutsi qui étaient venus aux cultes dans les églises protestantes de la CPZa ont été massacrés. Il semblerait que les fidèles d'ethnies Hunde et Nyanga portaient des signes recognitifs permettant aux agresseurs de les épargner. On évalue pour ces deux journées plus de 1.000 morts, non compris plusieurs personnes noyées dans la rivière LOWA dont les ponts en lianes étaient coupées expressément pour empëcher toute tentative de fuite. (Annexes 10 et 11).
L'annexe n° 12 reprend les dates, nombre de personnes tuées et les villages des victimes. Ces données sont en grande partie tirées du rapport des Médecins Sans Frontières et complétées par l'annexe n° 5b.

les 24, 25 et 26 mars 1993, le Gouverneur de Région séjourne dans la Zone de Masisi pendant 48 heures et reçoit les rescapés de Walikale à divers endroits. Malgré les informations reçues, l'Autorité Régionale ne s'est jamais rendue sur les lieux ou (ORDONNER? VERIFIER S.V.P., p. 9, fin 1er alinéa) n'a ordonné une enquëte quelconque.
· les 9 et 10 avril 1993, le Gouverneur de Région passe de nouveau à la Zone Masisi. Le mëme jour, un Hunde du nom de MUNIHIRE, chef de localité de Kaniro reçoit 11 militaires pour massacrer les Hutu et Tutsi. Se présentant comme pacificateur, il appelle d'abord les gens qui avaient fui, mais hélas, c'était une malignité de les avoir et de finir avec eux.
· le 10 avril 1993, ils auraient massacré les villageois du village BUABO (Annexe n°
13).
· les 10 et 11 avril 1993, 12 personnes auraient été fusillées au village MUVUMU et plus de 300 maisons incendiées (Annexe n° 13).
· le 13 avril 1993, incendie de tout le village de KALANGALA.
· le 14 avril 1993, 3 personnes auraient été tuées dans une ferme à KANIRO par ce
mëme groupe; et beaucoup d'autres villages furent incendiés dans ce mëme
groupement.
· le 14 avril 1993, un autre groupe de militaires et des HUNDE auraient tué 4
personnes sur la montagne de KAHONGORE située juste au-dessus du chef-lieu de
la Zone de Masisi par DIEGO.
· Pendant la mëme période, un groupe d'agresseurs fait irruption dans les écoles primaires et secondaires du chef-lieu de la zone de Masisi, blesse les enseignants des ethnies Hutu et Tutsi et aurait mëme violé des filles.
· dans le groupement de BUABO, en plus de MUNIHIRE, les rescapés citent d'autres massacreurs qui sont MM Alexis TUSSI, chef de localité de MUHANGA, MAULIZO, Notable, TABU, déserteur FAZ, DIEGO, chef de localité Bapfuna, HAMULI, chef de localité MIANO, MUBAWA Jacques, agent de l'Hôpital de Masisi. Notons que ceux-ci ont été cités dans les assassinats qui ont précédé les massacres à grande échelle.

· le 16 avril 1993, on aurait découvert une centaine de cadavres dans la rivière Osso, probablement provenant de LUIBO, en Collectivité Osso ou de LUKWETI en Collectivité Bashali.
· le 21 avril 1993, dans la Collectivité KATOYI, le village BULINDI a été incendié.
· le 22 avril 1993, de Mutongo on annonce un affrontement à LUKWETI et 4 villages incendiés (Bweraleme, Cyungo, Katanga et Mutongo). Plus de 100 personnes sont réfugiées à Bibwe.
· le 22 avril 1993, dans la localité de KALINGU, 7 villages sont incendiés: SHUNGISHA, SHANGI, BUCHUCHU, MUNGAZI, BUHOTO, BUKALA et BUPFIHI. Les réfugiés seraient accueillis dans les villages LUFURANINDI, BUTARE, MURAMBI I et II et KAKONO.


5. CONCLUSION.

Ces massacres constituent une suite logique de ceux des années 1962 - 1964 et ne visent que l'élimination des ethnies Hutu et Tutsi, qui, selon les indices apparents inquiètent les voisins Hunde, Nyanga et Nande tant du point de vue démographique qu'économique.
La haine est attisée par des politiciens principalement à chaque approche d'une échéance politique.
Quant au niveau des populations paysannes, on constate que ce sont des politiciens qui les poussent à se hair car la cohabitation séculaire signalée ci-haut démontre très bien qu'il n'y avait jamais eu de conflits apparents entre elles avant 1962.
Tant que le problème de nationalité n'aura pas été clairement et honnëtement résolu, le Nord-Kivu ne connaîtra pas une paix durable car les agresseurs actuels pourront récidiver.


PROPOSITIONS.

Pour rétablir la paix et réhabiliter la cohabitation pacifique des ethnies en conflits, proposons ce qui suit:


1- Mettre sur pied des comités interethniques à tous les niveaux.


2- Mettre fin au quadrillage militaire des zones habitées par les Hutu et Tutsi.


3- Réinstaller les personnes déplacées dans leurs droits.


4- Mener des enquëtes sérieuses qui permettront de sanctionner les coupables.


5- Respecter scrupuleusement les Droits de l'Homme.



Fait à Goma, le 25 avril 1993.


POUR LES COMMUNAUTES ZAÏROISES HUTU ET TUTSI DU NORD-KIVU,

Tuesday, September 25, 2007

General Karenzi Karake : Un general rwandais controversé nommé par l’ONU au Darfour



25/09/2007 20:30


Confirmé la semaine dernière au poste de numéro deux de la future force de paix au Darfour, le général rwandais Karenzi Karake est soupçonné d’avoir couvert des crimes commis par des troupes placées sous son commandement


L’annonce de la nomination d’un général rwandais soupçonné de crimes de guerre au poste de commandant en second de la future force de paix au Darfour sème le trouble à l’ONU et au sein des grandes ONG de défense des droits de l’homme. Le général Karenzi Karake, 46 ans, a, à plusieurs reprises entre 1993 et 2000, commandé des unités de l’armée rwandaise accusées de graves exactions, dont certaines ont été dénoncées par l’ONU.Ce fut le cas par exemple en 2000 dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC). À l’époque, les armées ougandaise et rwandaise, autrefois alliées dans leur opposition au gouvernement de Laurent-Désiré Kabila, s’affrontent pour le contrôle de la ville de Kisangani, haut lieu du commerce des diamants.


L'armée rwandaise dénoncée en RDC


Du 5 au 11 juin 2000, des combats extrêmement violents éclatent : les deux armées pilonnent sans discernement les quartiers résidentiels de la ville.« Plus de 760 civils ont trouvé la mort et 1 700 ont été blessés », estime la mission d’évaluation de l’ONU qui se rend sur place deux mois plus tard. « Les forces armées ougandaises et rwandaises ont utilisé plusieurs établissements scolaires pour lancer des attaques », rapporte la mission, qui souligne que la manière dont les combats ont été menés par les deux bords dénote un « mépris profond pour la population civile ».À la tête de l’Armée patriotique rwandaise (APR) à Kisangani, le « responsable des opérations et de l’entraînement », Karenzi Karake a alors rang de colonel. Il est arrivé sur place le 25 mai, officiellement pour superviser le désengagement des troupes ougandaises et rwandaises. En fait de retrait, la « guerre des six jours », début juin, justifiera à elle seule une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU.


A la tête de la Direction du renseignement militaire


Fils d’exilés rwandais d’Ouganda, Karenzi Karake s’est engagé dès le début des années 1990 au sein du Front patriotique rwandais (FPR) qui prendra le pouvoir à Kigali en 1994. Décrit par un ancien lieutenant de l’APR, Abdul Ruzibiza (1), comme l’organisateur de plusieurs assassinats de leaders hutus opposés au FPR en 1993-1994, il est placé au lendemain du génocide à la tête de la Direction du renseignement militaire (DMI), un organisme accusé de nombreux crimes.Karenzi Karake est cité dans une plainte en cours d’instruction auprès de l’Audience nationale espagnole. Elle vise des officiers supérieurs de l’APR pour leur implication présumée dans le meurtre de neuf ressortissants espagnols, dont six missionnaires catholiques, et pour d’autres crimes commis entre 1990 et 2002. « Quand j’ai appris la nomination de Karenzi Karake, je me suis demandé s’il n’y avait pas de militaire rwandais compétent pour occuper un tel poste qui ne soit pas suspect de tels crimes », s’étonne l’avocat Jordi Palou Loverdos, porte-parole des plaignants. « Tout officier général rwandais actuel était en activité à cette période, avec tout ce que cela implique », estime un responsable d’une ONG de défense des droits de l’homme.


"De fortes présomptions de crimes commis sous ses ordres"


C’est un parti d’opposition en exil, les Forces démocratiques unifiées, qui a le premier attiré l’attention sur le passé trouble du général. Mais certaines de ses accusations ont été facilement démenties par les autorités rwandaises, qui ont loué « l’expérience » d’un officier « qui a valablement servi dans plusieurs fonctions de commandement ». Les principales ONG de défense des droits de l’homme ont elles aussi alerté l’ONU, plus discrètement. En 1998, un rapport d’Amnesty International consacré au Rwanda relatait des assassinats de civils commis par l’APR pendant les mois de février à avril 1998 dans la province de Gitarama et en mai dans la préfecture de Ruhengeri. Or, selon des dépêches et articles de presse de l’époque, Karenzi Karake, alors lieutenant-colonel, commanda les opérations de l’APR à Gitarama à partir de décembre 1997 avant d’occuper le même poste à Ruhengeri à partir de mai 1998 au plus tard.« Nous avons de fortes présomptions que des crimes ont été commis sous ses ordres, déclare sous le couvert de l’anonymat un chercheur d’une ONG. Si le statut de Rome s’appliquait avant 2002, Karenzi Karake serait passible de la Cour pénale internationale. » « Nous avons immédiatement fait part de nos doutes au département des opérations de maintien de la paix de l’ONU, confirme de son côté un responsable d’une autre ONG. Nous ne disposons pas de preuves formelles mais nous sommes persuadés que le Tribunal pénal international pour le Rwanda, entre autres, est susceptible d’en posséder. »


Un imbroglio diplomatique


Selon nos informations, l’ONU a demandé au gouvernement rwandais de lui proposer une liste de plusieurs officiers parmi lesquels elle pourrait faire son choix pour le Darfour. Le Rwanda a alors opposé un refus assorti de la menace d’un retrait de ses troupes du Darfour. Un chantage efficace, alors que la force hybride ONU-Union africaine (UA) tarde à se mettre en place. S’élevant à 2 000 hommes dans l’actuelle force africaine, la participation rwandaise devrait atteindre 2 800 soldats dans la future force de 26 000 hommes qui doit être déployée en 2008.L’ONU est embarrassée, car ses relations avec le Rwanda sont déjà très délicates en raison de sa gestion désastreuse du dossier rwandais avant et pendant le génocide de 1994. L’Union africaine n’a pas simplifié les choses en confirmant en août, sans concertation avec l’ONU, la désignation du général Karake, annoncée par Kigali. Karenzi Karake est arrivé au Darfour le 16 septembre, avant la confirmation par l’ONU de sa nomination le 17, et avant même, selon certaines sources, la signature de son contrat. Cette entrée en fonction n’a pas éteint toutes les réserves à l’ONU et au département d’État américain. « Pour l’efficacité de la mission, c’est un bon choix, estime un Occidental l’ayant côtoyé de longue date. Du point de vue de la morale, c’est un autre problème. »


Laurent D’ERSU


(1) Auteur de Rwanda, l’histoire secrète, Panama, 2005, 22 €.


Friday, September 14, 2007

Dr Lazare Ndayongeje: MYTHE DES ORIGINES, IDEOLOGIE HAMITIQUE ET VIOLENCE EN AFRIQUE DES GRANDS LACS

MYTHE DES ORIGINES, IDEOLOGIE HAMITIQUE ET VIOLENCE EN AFRIQUE DES GRANDS LACS : COMPRENDRE ET AGIR.

Dr Lazare Ndayongeje, Directeur de Programme, Politique & Géopolitique Burundaise, Burundi Réalités International (BRI Inc.)

16 août 2004

INTRODUCTION

Les contradictions à l’origine des tensions et des conflits socio-politiques ne sont pas toujours apparentes. Bien souvent, les groupes d’intérêt les masquent en leur donnant une pseudo explication mystificatrice. Un des rôles de l’idéologie politique est non seulement de fournir une interprétation du monde mais également d’indiquer un idéal social. C’est pourquoi elle est souvent le lieu théorique où s’investissent les falsifications intéressées de l’histoire et de la réalité sociale et politique. Pour l’Afrique et singulièrement pour la région des Grands Lacs, deux mythes idéologiques ont été cultivés et n’ont pas encore cessé de faire des ravages : il s’agit du mythe des origines et de celui du tutsi-hamite, et plus récemment du tutsi juif. Le terme mythe a plusieurs sens et de ce fait est ambigu. Du grec muthos : parole, récit, le mythe signifie à la fois une représentation collective de haute teneur psychologique et affective ( mythe du progrès, mythe de l’âge d’or) et un récit dont le fondement rationnel est absent et qui pour fournir une explication recourt aux ressources d’un imaginaire fabuleux. Dans le mythe, il y a un défaut d’explication rationnelle compensé et masqué par les séductions d’un artifice poétique, religieux ou fantastique et fantasmatique. Le mot idéologie est également polysémique. Il signifie un système d’idées destiné à voiler ou à justifier par un « arôme spirituel » la domination d’une classe sociale ( K. Marx) ; une projection dans un imaginaire consolant d’une situation intenable et contradictoire (L. Feuerbach) ; ou une rhétorique incapable d’expliquer ses concepts et qui est l’expression détournée des intérêts d’une classe sociale ( L. Althusser). Dans ses investissements historiques successifs l’idéologie hamitique a revêtu tour à tour et parfois concomitamment les aspects d’un mythe, d’une illusion rassurante, d’un masque des intérêts et d’une volonté de domination. Mythe et idéologie ont ici en commun la manipulation intéressée de l’illusion (entendue dans le sens freudien comme croyance dans laquelle la force du désir fait méconnaître la réalité) et des fantasmes.

Au regard du potentiel mortifère du mythe des origines et de l’idéologie hamitique, il nous paraît important de revisiter leur genèse dans l’espoir de susciter un débat et des engagements salutaires

1. Mythe des origines : théories de l’espace, déterminisme géographique et naturalisme.

Dans l’entendement ordinaire, l’espace pourrait être considéré comme quelque chose de vide, un réceptacle neutre sans impact sur les personnes et les choses. En réalité les penseurs qui ont abordé l’analyse de cette notion ont divergé. Le même désaccord peut être constaté à propos de l’influence du lieu géographique de naissance, certains considérant qu’il constitue un facteur identifiant, d’autres n’y voyant qu’un élément plutôt secondaire. Au demeurant, l’homme est-il l’œuvre de la nature ?

1.1. L’espace : le vide ou l’ordre des coexistences possibles ?

Aristote définit l’espace comme un lieu doté d’une certaine puissance organisatrice(1). Chaque chose est amenée à rejoindre sa place naturelle : les choses terreuses en bas , le feu en haut , l’eau et l’air dans l’intervalle. Il y a violence chaque fois qu’un objet est éloigné de sa place naturelle : par exemple quand je jette un caillou en l’air…Heureusement le naturel va revenir au galop. Pour le physicien Isaac Newton, l’espace est un cadre indépendant des objets qui l’occupent tandis qu’Albert Einstein y voit une simple possibilité de position. Une boîte par exemple délimite une possibilité de position (2). Leibniz pour sa part définit l’espace comme l’ordre des coexistences possibles tandis R. Descartes se démarque en définissant l’espace comme la substance matérielle des choses : l’espace ce n’est pas le lieu de la chose, c’est la chose même dans sa consistance matérielle. « …la même étendue qui constitue la nature du corps constitue aussi la nature de l’espace(3)».

Si nous retenons la définition de l’espace comme l’ordre des coexistences possibles, « non seulement entre les existants, mais encore entre les possibles comme s’ils existaient » il se pose dès lors une série de questions sur ces coexistences. S’agissant de la coexistence des hommes avec la nature environnante, trois thèses peuvent être envisagées : le primat du monde physique, le primat de la culture, ou alors une synthèse dynamique entre le naturel et le culturel.

1.2. Du déterminisme géographique au « régionalisme. »

Jean Bodin, dans son ouvrage La république, au livre V chapitre premier, a théorisé en le politisant l’impact des zones climatiques. Le Nord, le Midi et la zone tempérée produiraient des types d’hommes différents. L’homme du nord serait brutal, versatile, sans parole donnée, chaste et pudique. Il serait gouverné par la force. L’homme du midi serait plutôt rusé et vindicatif, lubrique, porté vers les sciences et la contemplation. Il serait gouverné par la religion. L’homme du climat tempéré, porté aux sciences politiques, les lois, la grâce de bien discourir, serait gouverné par la raison et la justice. On voit là un déterminisme géographique qui imposerait des caractères spécifiques et définitifs. Jean Bodin, pour qui les vents rendent les hommes inquiets alors que les montagnes les rendent indépendants et farouches pour leur liberté, a dû reconnaître la possibilité pour la discipline, donc l’éducation, de changer le naturel. « Voilà, écrit-il, quant aux naturelles inclinations des peuples, lesquelles toutefois n’importent point de nécessité…mais qui sont de bien grande conséquence pour l’établissement des républiques, des lois , des coutumes …(4) »

On sait par ailleurs que Montesquieu a repris, au livre 14 de L’Esprit des lois (1748) la théorie des climats. Le froid, pensait-il, resserre les extrémités des fibres de notre corps et augmente leur force, le chaud les allongerait et diminuerait leur force. Et avec la force causée par le froid, la confiance en soi, la hardiesse dans l’entreprise, moins de désir de vengeance, peu de sensibilité à la douleur, aux plaisirs, à l’amour. Montesquieu fait l’apologie des peuples du nord qui briseraient les fers forgés au midi. « C’est là que se forment ces nations vaillantes qui sortent de leur pays pour détruire les tyrans et les esclaves, et apprendre aux hommes que, la nature les ayant fait égaux la raison n’a pu les rendre dépendants que pour leur bonheur. » Mais déjà, s’insinue dans la pensée de Montesquieu une contradiction : qu’est-ce qui détermine l’esprit des nations : le climat ou de la raison ? Accusé de spinozisme (affirmation de la nécessité s ‘imposant aux hommes ) Montesquieu fut obligé de rédiger en 1750 une Défense de l’Esprit des lois et d’affirmer le rôle des causes morales. Plus les causes physiques portent les hommes au repos, plus les causes morales les en doivent éloigner écrit-il, insistant sur la responsabilité des législateurs. Au total, le climat chez Montesquieu restera un facteur parmi d’autres, à côté de la religion, des mœurs et des lois, des maximes du gouvernement, et des exemples des choses passées.

On le devine aisément : le déterminisme géographique, basé sur l’idée que la zone géographique et son climat influencent de façon décisive les qualités des gens tant au plan intellectuel que moral peut être à l’origine de divisions sur la base de la provenance provinciale ou régionale. Sans être explicitement revendiquée, une telle pseudo-théorie sous-tend la démarche de certains politiciens à court d’arguments politiques, qui indexent telle ou telle région comme « produisant » des hommes naturellement …méchants.

1.3. Nature humaine et racisme.

On peut définir la nature comme ce que l’homme trouve, ce qui n’est pas l’œuvre de l’art ou de la culture en général, ce qui n’est pas fabriqué. Sur le plan biologique, est naturel ce qui est inné et se transmet par hérédité. S’agissant de la nature humaine, la question est de savoir si nous naissons hommes ou si nous naissons potentiellement hommes. Y a-t-il un concept universel de l’homme qui soit nécessaire et qui se réalise inévitablement dès que celui-ci naît ? L’affectivité, l’intelligence, la créativité sont-elles inscrites dans ses gènes ?

Abordant la question, Lucien Malson, dans Les enfants sauvages écrit : « Le problème de la nature humaine, c’est en somme celui de l’hérédité psychologique…rien n’est plus contestable que la transmission par le germe de « propriétés » définies, décelables dans l’ordre de la connaissance et de l’affectivité -donc de l’action. (5)» L’étude des enfants sauvages privés d’éducation, a montré que sans société ni socialisation dans les délais convenables, le potentiel intellectuel, affectif et moral s’atrophie et l’on ne peut plus espérer avoir un humain accompli, mais un être qui se comporte comme les bêtes auprès desquelles il a grandi. De plus , deux jumeaux monozygotes élevés dans des milieux différents auront des comportements et des capacités intellectuelles différents.

Néanmoins, François Jacob dans « Le Monde » du 11 /12 février 1972 recommandait d’éviter deux extrêmes : celui de la fatalité génétique où tout, dans l’intelligence, les sentiments et les comportements serait déterminé par l’hérédité ; et celui de la cire vierge où tout serait acquis. « Le programme génétique met en place ce qu’on pourrait appeler des structures d’accueil qui permettent à l’enfant de réagir à son milieu, de repérer des régularités, de les mémoriser puis de combiner les éléments en assemblages nouveaux » . De la sorte, il y a interaction entre le génétique et le socioculturel dans une perfectibilité relative.

En fin de compte, on ne parle plus de nature humaine, mais de potentialités humaines pouvant être plus ou moins développées. Les travaux des anthropologues et les recherches sur l’intelligence humaine et animale ont dégagé ces potentialités : la liberté dans le temps et l’espace car l’action humaine n’est pas seulement liée au présent ou à la présence des objets ; la capacité de combiner les objets pour attendre un but et l’invention des signes pour faciliter et représenter cette combinatoire, l’invention et la pensée de la pure chose (x) liée à chaque objet, c’est-à-dire l’abstraction formelle ; l’exigence des règles dont la prohibition de l’inceste ; la pratique du don et de l’échange ; l’exigence de réciprocité.

De là , on comprend que les hommes n’étant pas le seul résultat de leurs gènes , mais aussi de l’éducation, on ne peut les figer une fois pour toutes dans un déterminisme biologique et que les ghettos organisés autour de la pureté raciale n’ont pas de fondement réellement humain. Or le raciste explique les différences sociales et culturelles comme l’effet de l’hérédité. La division d’une société en classes est fondée, pense-t-il, sur les propriétés héréditaires. « Ceux qui sont aujourd’hui des prolétaires doivent leur situation inférieure aux tares héréditaires de leur corps et de leur esprit. (6)» La femme est minoritaire parce que génétiquement inférieure, le nègre est esclave parce que génétiquement , naturellement déficient…

S’il n’y a pas de rapport de nécessité entre un programme génétique invariable et des qualités intellectuelles , affectives et morales d’un individu ou d’une race ; s’il ne peut encore moins y avoir un lien absolu entre un trait culturel ( religion, langue, coutume) et un peuple, une ethnie ou une race, à cause du caractère contingent et évolutif de la culture ; s’il n’ y a pas non plus de relation de cause à effet entre la zone géographique et climatique et ‘l’esprit ‘des gens qui y habitent, le déterminisme naturel fixiste sur lequel s’appuient les théories régionalistes et racistes ne devrait qu’être rangé au musée des erreurs passées . Malheureusement, ces erreurs , devenues des mensonges profitables , des idéologies politiques , n’ont pas cessé de hanter les hommes, même les savants et soi-disant éclairés. Tel est le cas de l’idéologie hamitique.

2. L’idéologie hamitique : une arme de combat et de domination.

Le terme hamite ou chamite enveloppe une des plus funestes manipulations de la réalité historique et culturelle. Partant de la malédiction consécutive à la faute présumée de Cham, l’idéologie hamitique servira aux Hébreux pour frapper d’infamie les Egyptiens et les Noirs, ensuite elle servira pour justifier l’esclavage et la colonisation, puis par une transmutation due à Gobineau, elle servira à dénier aux peuples Noirs toute contribution à la civilisation universelle, toute innovation culturelle africaine étant attribuée à l’apport fécondant de Hamites d’origine blanche. Après avoir servi à nier l’apport des Noirs dans la civilisation égyptienne, elle va être utilisée pour présenter les élites des pays des Grands Lacs comme étrangères, apparentées aux colonisateurs et naturellement appelées à participer avec eux au parachèvement de l’œuvre civilisatrice. Avec l’idéologie hamitique, le venin du racisme va pénétrer dans cette région de l’Afrique, semant des divisions et des haines qui ont culminé dans des génocides. Elle déforme encore la conscience de certaines élites à tel point que Drake aurait encore raison de titrer, comme en 1959, son article : « Détruire le mythe chamitique, devoir des hommes cultivés. (7) »

2.1. De la malédiction de Cham à la malédiction des Noirs

Le mot chamitique ou hamitique vient du nom Cham, l’un des trois fils de Noé. Dans la Bible, Ancien Testament, le livre de la Genèse dit au chapitre 9 versets 18-27 que Cham ayant vu son père ivre et nu, il en avait averti ses frères, Sem et Japhet. Le père une fois sorti de son ivresse apprit « ce que lui avait fait » son jeune fils, et maudit Canaan, fils de Cham en le condamnant à être l’esclave de ses frères. Au chapitre 10, la Genèse présente comme fils de Cham, Kouch, Misraïm , Put et Canaan. Et comme fils de Kuch, Séba, Havila, Sabta, Ragma, et Sabteka. Comme fils de Ragma, Saba et Dédan. A ce niveau, tous les peuples de la terre sont présentés comme issus d’un même père. Mais certaines traditions juives vont exploiter l’histoire de la malédiction de Cham pour la transformer en celle des Noirs. Une confusion, peut-être intéressée et délibérée, a été faite entre Cham et trois racines de l’égyptien ancien : ham qui signifie être chaud, brûler ; hm,hmw qui veut dire esclave, disciple et km, kam qui signifie être noir, brunir. Kmt est à la fois une chose noire, la terre noire fertile par opposition à deseret, terre rougeâtre et stérile, l’appellation de l’Egypte, du roi et des habitants de l’Egypte. Kami désigne le dieu Osiris etc. L’auteur de la Genèse « aurait identifié les contenus sémantiques des trois points ou de deux seulement comme le fera plus tard Philon d’Alexandrie qui, commentant ce passage (Gen. 9, 18-27), identifiera km et la chaleur (hm) d’autant plus facilement que ham en hébreux a le même sens que dans l’égyptien ancien. (8)» Dans une étude sur l’hypothèse hamitique, son origine et sa fonction diachronique, Edith R. Sanders montre que la malédiction passa des noms de Cham, de Canaan, d’Egypte etc à la couleur noire de la peau et même à la physiologie et à la conduite morale des Noirs « comme le montrent clairement les traditions rabbiniques du Talmud babylonien dans lequel les descendants de Canaan deviennent des Noirs et des dégénérés.(9) » En fait la Genèse escamote le vrai motif de la malédiction et les traditions sur l’ivresse de Noé varient : l’une dit que Noé a été castré par Canaan, l’autre qu’il a été émasculé par Cham, tandis qu’une troisième raconte qu’il l’a été par un lion. Dans la mythologie (grecque et hittite par exemple), le mythe de la castration du père est fréquent : Chez les Grecs, Ouranos est émasculé par Kronos, qui a son tour est émasculé par Zeus. Les Hébreux ont récupéré ce thème mythique pour l’exploiter contre les peuples du sud et les Noirs. « Tout cela provient du fait qu’à un moment donné de l’histoire réelle des peuples, les Hébreux qui avaient des prétentions sur la terre des Cananéens ou des Philistins alors alliés des Egyptiens vers l’époque de Ramsès III(1182-1151), avaient besoin d’une puissante idéologie de caractère cosmique pour légitimer leurs prétentions politiques. (10)» Cette idéologie de la malédiction des Noirs restera désormais latente au long de l’histoire. Au XIVème siècle Ibn Khaldun essaye même de la combattre et d’expliquer que la couleur noire n’est pas la suite de la malédiction de Noé mais plutôt l’effet de l’air sous une très grande chaleur. Il constate dans son Muqaddimah ou Introduction à l’histoire universelle qu’il est dit dans la Torah que Noah a maudit son fils Ham mais qu’aucune référence n’y est faite à la couleur noire.

Aux 18è et 19è siècles, l’idéologie de l’infériorité des Noirs se donne de plus en plus les apparences de la science, étant relayée par des penseurs éminents.

Le siècle dit des Lumières n’apportera pas de rayons d’objectivité sur la réalité humaine des Noirs (11). D. Hume trouvait que les nègres n’ont aucun signe d’intelligence, Voltaire trouvait qu’ils sont irrémédiablement les derniers sur le plan intellectuel, le naturaliste Cuvier n’y voyait que des barbares proches des singes, tandis que le philosophe Hegel trouvait que l’Afrique était encore « enveloppée dans la couleur noire de la nuit ».

Les hommes d’Eglise et autres exégèses insistent sur la peine héréditaire « qui pèse sur une portion de la race africaine. »(Lamennais dans L’avenir, 1830). A.L. Montandon écrit en 1848 dans son Etude des récits de l’Ancien testament…« Il suffit de vous désigner les nègres pour vous rappeler à quel point la sentence de Noé s’est accomplie sur la postérité de Cham » Mais, pendant que le mythe de la malédiction des Noirs justifie l’esclavage et la colonisation, l’idéologie hamitique prend un tour inattendu avec le comte Arthur de Gobineau.

2.2. Les Chamites selon Gobineau ou la négation de la créativité des Noirs.

Gobineau intervient pour contrer la thèse, défendue par exemple par Volney sur le caractère noir et africain de la civilisation égyptienne ancienne. Il s’ingénie à récupérer le concept péjoratif de Chamite pour lui donner une nouvelle signification.

Avec son Essai sur l’inégalité des races humaines(1853) le comte Arthur de Gobineau va donner au racisme et à l’idéologie hamitique une autre tournure non moins dangereuse. Gobineau distingue notamment les races Caucasienne, Sémitique, Japhétide, Jaune et Noire /Chamitique . Chaque race a selon lui sa spécificité intellectuelle et morale. « Les deux variétés inférieures de notre espèce, la race noire, la race jaune, sont le fond grossier , le coton et la laine , que les familles secondaires de la race blanche assouplissent en y mêlant leur soie, tandis que le groupe arian, faisant circuler ses filets plus minces à travers les générations ennoblies, applique à leur surface , en éblouissant chef-d’œuvre, ses arabesques d’argent et d’or.(12) » Le Noir incarne la laideur, la superstition, la brutalité, l’anthropophagie , la médiocrité, la souillure. La civilisation égyptienne serait le résultat du mélange de touristes blancs, éléments civilisateurs, avec des Noirs autochtones. Les Chamites de Gobineau sont primitivement des Blancs mais leur destin a été de se mêler à la race ‘’mélanienne’, de se métisser et de disparaître. « Les anciens Chamites blancs allèrent se perdant chaque jour, et finirent par disparaître. Leur descendance mulâtre, qui pouvait très bien encore porter leur nom comme un titre d’honneur, devint par degrés, un peuple saturé de noir. (13)» Selon lui, les Chamites qui ont fondé les civilisations nord africaine et mésopotamienne telles que celles de Carthage, de Ninive, de Babylone étaient des Noirs ayant assimilé du sang blanc ou ‘’arian’’. Après Gobineau, les Noirs se divisent en vrais et faux nègres, et toute trace de civilisation est imputée à la présence du sang des chamites.

Les linguistes, les anthropologues, les ethnologues et les égyptologues vont s’engouffrer dans la brèche ouverte par Gobineau et chercher des hamites derrière toute civilisation africaine. Chez certains linguistes, les langues sont classées en relation avec la hiérarchie culturelle et raciale de leurs locuteurs Ainsi par exemple, Carl Meinhof écrit en 1936 que « les créateurs de langues à classes ne sont pas des natifs de l’Afrique et (…) n’étaient pas des nègres ». Et l’anthropologue J. Deniker dans Les races et les peuples de la terre (Paris, 1900) affirme que « l’élément dit khamitique, d’origine asiatique ou européenne(…) se superposa sur les nègres, les négrilles et les boshimans ». De plus, dans son article intitulé « Détruire le mythe chamitique, devoir des hommes cultivés », Drake cite l’ouvrage de Friedrich Ratzel intitulé Histoire de l’humanité et publié à Londres en 1895 dans lequel Ratzel explique que le terme chamitique doit être appliqué aux « tribus dont le type de physionomie approche les plus nobles formes de visages blancs bien que leur couleur soit aussi noire que celle du Noir typique. (14)»

Mais l’un des anthropologues les plus acharnés à hamitiser l’Afrique fut sans aucun doute Sir Harry Johnston(15). Pour lui, en effet, les Hamites étaient linguistiquement et racialement de même origine que les Sémites et viennent peut-être « du sol fertile des peuples conquérants » de l’Asie du Sud-Ouest. Les Hamites sont la forme primitive ou modifiée du caucasien. « Les nègres Nilotiques sont très tôt sous l’influence de la forme primitive de l’homme blanc, le Hamite ».Ce sont les ancêtres des dynastes égyptiens. Ils conquirent l’Egypte et l’Afrique noire jusqu’au Cameroun et à l’ouest de l’Afrique. A l’Est, ils descendirent jusque dans les pays des grands Lacs. Ce sont eux qui ont apporté l’usage du métal. Ce sont des aventuriers égyptiens qui, en descendant devinrent partout des chefs, des demi-dieux à cause de leur peau claire, de leurs beaux traits et de leurs arts. Les civilisations africaines sont tributaires et redevables au sang blanc des Hamites, de l’Egypte au Zimbabwe, des Grands Lacs au Bénin en passant par les Bashi et les Lubas qui devraient aux Hamites l’art de la métallurgie. « Sometimes one is disposed to think that those remarkable cattle-keeping aristocracies of the heart of Central Africa- the Bahima, the Batutsi, the Makarka, and Mangbettu are descended from Egyptian colonists of 2,000 and 3,000 ago »,note Johnston.

2.3. Les Hamites des Grands Lacs, des explorateurs aux « savants », des colons aux missionnaires.

Le dix-neuvième siècle dit de l’histoire était féru de recherche de l’origine et de l’évolution des choses. Les langues, les peuples, les civilisations, les races, l’esprit, etc. tout fut appelé à donner sa source et de prendre place sur l’échelle de l’évolution au sommet de laquelle trônait, bien entendu, la civilisation occidentale chrétienne et technicienne. Tout ce qui, en Afrique, portait la marque du génie dans l’organisation politique et sociale, dans l’élaboration métaphysique, les sciences, les arts, l’architecture etc. fut attribué à des éléments fécondants blancs.

L’explorateur anglais J.H.Speke, qui passa dans la région dans les années 1850 (au Burundi en 1858) impressionné par l’organisation de l’Afrique des Grands Lacs avança l’hypothèse d’une migration galla venue d’Ethiopie. Et après lui, Oscar Baumann écrira : « Les peuples étudiés ici appartiennent linguistiquement tous au groupe bantou. Cependant du point de vue anthropologique on sera obligé ici de les grouper en hamites et en nègres, les premiers étant représentés par les tribus des pasteurs, watussi ou wahuma. Sur les populations agricoles bantu établies depuis des temps immémoriaux s’est déversé, il y a plusieurs millénaires, un courant d’immigrants de pasteurs hamites originaires de l’Abyssinie du sud des pays nordiques des Galla. (16) »

Le congrès Universel des races de 1911 fit l’éloge des hamites à la grammaire admirable, au nez aquilin, au beau crâne vaste et orthognate (17). Et le docteur Richard Kandt reprit l’idéologie en 1914 en ces termes : « Les Watussi sont une caste noble d’étrangers sémitiques qui ont subjugué toute la zone interlacustre et dont la taille géante dépassant parfois les deux mètres, fait penser au monde des fées. »(Caput Nili). Pour sa part le Duc de Mecklenburg fera le portrait robot des hutu, agriculteurs bantu, laids, esclaves bons pour les travaux durs, et les tutsi venus d’Egypte et d’Arabie…Membre d’une expédition scientifique allemande en Afrique centrale dirigée par ce duc, l’ethnologue Jan Czekanowski dira que les Batutsi et les Bahuma doivent être mis en relation avec les tribus nilo-hamitiques de la rive Est du bassin du Nil.

Les administrateurs coloniaux, informés et déformés par ces clichés s’employèrent à les faire pénétrer dans la tête des élites des Grands Lacs, singulièrement du Rwanda et du Burundi. « Les Batutsi étaient destinés à régner. Leur seule prestance leur assure déjà, sur les races inférieures qui les entourent un prestige considérable. (18) » Voilà comment s’exprimait P. Rychmans qui fut administrateur résident du Burundi pendant dix ans.

Les missionnaires ne furent pas en reste : des évêques aux prêtres et aux abbés, l’Eglise catholique participa activement à l’enracinement de l’idéologie hamitique. Mgr Gorju, s’interrogeant sur les rois tutsi trouva cette réponse : « Sans doute d’audacieux chefs de bande, l’infiltration de blancs au milieu des noirs, c’est-à-dire des apathiques bantu …(19) » De même, Mgr Léon Classe qui fut archevêque du Rwanda écrivait en 1922 « La population du Rwanda est formée de trois races : les Batutsi, la classe noble, les Bahutu, ou le peuple, les Batwa ou pygmées… Les Batutsi ne sont pas des bantu, ce sont, si vous voulez, des négroïdes : c’est le peuple de l’Afrique qui possède le plus fort indice hamitique. Autrefois, longtemps avant l’ère chrétienne, il y eut d’Asie Mineure de fortes migrations de peuples qui passèrent en Egypte puis peuplèrent l’Abyssinie, et, peu à peu, s’écoulèrent vers le sud. Là est l’origine probable de nos Batutsi… » Le prélat ne manquait pas de parler de la grande taille des Batutsi , de leur physionomie agréable « parfois même rappelant de près la race sémitique. (20)»

Le père Pagès, du Rwanda, écrira à son tour, en 1933, Un royaume hamite au centre de l’Afrique. Dans cet ouvrage le prêtre étend aux peuls le qualificatif de hamite et prétend que les tutsi sont des hamites-sémitiques venus d’Egypte et d’Abyssinie, dans des caravanes avec des porteurs nègres. «On rencontrera souvent le mot « hamite »…il sert à désigner les ‘Batutsi’ qui sont les mêmes que les ‘Bahimas’ de l’Uganda et du Nkole…les ‘Banyambo’ du Ndorwa et du Karagwe. Les ‘Peuls’ou ‘Peulhs’ (au pluriel Foulbé ou Foula) du Soudan…paraissent eux aussi, fortement apparentés à la race des Hamites. (21) »

Parmi les autochtones, l’Abbé rwandais, Alexis Kagame a joué un rôle important dans l’enracinement de l’idéologie hamitique, d’une part à cause de sa contribution dans l’écriture de l’histoire du Rwanda, d’autre part à cause de la respectabilité des hommes d’Eglise. Il restera le symbole même de l’intellectuel incapable de se départir d’une idéologie que les faits qu’il étudiait ne cessaient de démentir. Nous le verrons plus loin. Un quart de siècle après l’indépendance du Rwanda et du Burundi, paraissait en 1978, de Paul Del Pérugia , Les derniers rois mages. On y lit que « Le Hamite …ne gravit que très tard, à la fin du XIIième siècle, la zone inter-lacustre. …Tout rendait ces immigrants irréductibles aux Bantous. Les hamites ne sont ni négroïdes, ni européïdes. L’origine de leur race splendide demeure toujours mystérieuse. (22)»

2.4. Présomptions sans fondement et mépris des faits.

Aucun de ceux qui ont répandu l’idéologie hamitique n’a pu lui fournir une assise scientifique. Et l’on reste étonné par la disproportion entre cette absence de base et la ténacité avec laquelle elle continue de hanter l’Afrique, de diviser et détruire ses enfants. L’échantillon ci-après, tiré des documents respectifs cités ci-haut montre avec quelle légèreté ses partisans la présentent : « Il paraît impossible de croire, à en juger par l’apparence physique des Wahûma, qu’ils puissent être d’une autre race que celle mi-shem mi-hamitique d’Ethiopie » écrivait John Hanning Speke. « Là est l’origine probable de nos Batutsi » écrivait Léon Classe pour qui « On peut établir tout un faisceau d’indices tirés de la constitution physique, des mœurs et coutumes, des légendes des Batutsi. Aucun argument ne peut être pris dans la langue… » Le père Pagès parlait de « quelques présomptions et quelques données sur lesquelles on peut s’appuyer pour essayer de faire un peu de lumière. »

Ceux des propagateurs du hamitisme qui se sont efforcés de lui trouver des assises n’ont pas réussi et ont été obligés de tordre les faits , cédant à l’impératif d’un a priori récurrent. Ce fut le cas notamment d’A. Kagame et de Mgr Gurju.

Dans un article intitulé : « Les Hamites du Rwanda et du Burundi sont-ils des Galla ? (23) » Alexis Kagame, déjà convaincu que les Batutsi étaient des hamites les répartissait en trois groupes : les Couchites : Somali, Galla ; les Nilo-hamites : Sud-Est du Soudan, Nord-Est de l’Ouganda, Ouest du Kenya, Nord-Est du Tanganyika ; les Hamites inter-lacustres : Bahima, Bahinda, Batutsi du Rwanda, du Burundi et du Buha. Il constatait que « Les différences entre ces trois groupes se situent dans les systèmes linguistiques, dans les institutions sociales et politiques, ainsi que dans divers éléments culturels qui en découlent. Ces facteurs de différenciation n’empêchent cependant pas qu’il y ait, même du point de vue culturel, une certaine unité fondamentale, parallèle à celle de la race. S’il en était autrement, ils auraient été difficilement groupés sous l’étiquette commune de’ civilisation hamitique’ qui leur est appliquée. »

L’étiquette: voilà l’ultime recours quand les faits culturels censés fonder cette pseudo civilisation hamitique si recherchée font défaut. En effet, étudiant comparativement six traits culturels importants à ses yeux, l’Abbé Kagame constate une nette différence. Les galla pratiquent la circoncision, « Les Hamites interlacustres n’ont aucune idée de cette coutume. » « Les galla utilisent la chèvre dans leurs cérémonies les plus vénérées…or chez les hamites inter-lacustres, la chèvre constitue une impureté.» Il constate qu’alors que chez les Batutsi la brebis partage le mythe de la vache et constitue avec elle un animal divinatoire, chez les galla c’est plutôt le bouc qui a ce statut, alors qu’il est tabou au plan social et divinatoire chez les Batutsi. Kagame fait le même constat à propos du Zébu : les Galla élèvent la vache zébu (ingwêba). « Mais les Batutsi et les Bahima considèrent comme impur le lait de la vache zébu, au même titre que celui de la chèvre. Nos Hamites préféreraient mourir de faim plutôt que de se souiller en buvant de ce lait. ». Chez les Galla le forgeron devient un paria « or non seulement le forgeron n’est pas un paria chez nous, mais encore le Roi du Rwanda lui-même est le forgeron suprême du pays. » Enfin, il relève que « l’institution galla qui marque, d’une manière plus spectaculaire, l ‘absence de relation culturelle entre ces couchites et les hamites inter-lacustres » c’est-à-dire les Gada ou classes d’âge qui conditionneraient leur structure sociale et organisation politique. « Les Hamites inter-lacustres ignorent les classes d’âge…Le système socio-politique, en leur zone est axé sur la monarchie de droit divin. » Et l’Abbé de conclure sans appel : « Les Galla et les Hamites inter-lacustres en dehors de leur appartenance à la même civilisation pastorale et à la même race Hamitique n’ont jamais pu entrer en contact et s’influencer culturellement. »

L’autre homme d’Eglise qui a lancé (après J.H. Speke) l’idée des tutsi-galla (dans Entre le Victoria, l’Albert et l’Edouard, paru en 1920), et qui s ‘est perdu dans des contradictions, est Mgr Gorju du Burundi. Après avoir écrit que les princes burundais de la dynastie ganwa se disaient d’origine hutu, il s’est contredit, probablement sous la pression, pour propager une phrase qu’aurait prononcé le jeune prince Baranyanka : « notre dynastie est hamite ». En effet, il a noté dans un écrit intitulé Zigzags à travers l’Urundi comment son préjugé s’était heurté aux faits : « Lorsque, à force de faire et zigzags et enquêtes, nos idées se furent modifiées dans le sens de l’origine bantu de nos Hamites, nous conclûmes. » Mgr Gurju précisait ses preuves : les « affirmations très nettes de nos princes, vieilles légendes stéréotypées qu’on s’est transmises sous (leur) couvert, nous ont fait adopter longtemps l’opinion contraire et conclure à l’origine bantu de leur dynastie ». Entre autres princes, Gorju citait le grand chef Nduwumwe qui avait affirmé clairement : « Ne te méprends pas sur notre origine ; nous autres princes, notre premier aïeul était Muhutu, nous ne sommes que des bahutu .(24)» Une telle affirmation à une époque où n’était noble que ce qui était tutsi a requis du chef Nduwumwe un attachement certain à la vérité. Et Gorju insiste : « Il est des princes dont le faciès est du bantu pur. Nous nous fatiguerions à citer des noms parmi les anciens et les nouveaux. Bref , pris dans l’ensemble nos princes sont moins hamites que les simples pasteurs et, quand ils le paraissent, cela doit vraisemblablement être attribué à des unions incessamment répétées dans le stock hamite. » Gorju continue ainsi : « Leurs coutumes viennent à l’appui de leurs dires. Leurs hommes de confiance sont toujours parmi les manants. Un prince, lorsqu’il épouse une fille mututsi, accomplit des cérémonies dans une hutte d’un muhutu, constituée expressément pour cela par des bahutu, dans un kraal de bahutu. Lorsqu’un prince sent la mort venir, il se fait porter dans la hutte d’un de ses bahutu pour y mourir. (25)»

Malgré tout cela, semblable à Galilée contraint de se déjuger, Gorju écrit sans conviction : « Les rois barundi ne sont bahutu que parce qu’on les appelle bahutu. Le roi de l’Urundi est muhutu en théorie. (26) » L’historien Jean-Pierre Chrétien reprend le témoignage de Gorju en le citant : « Tout le monde le dit ici et les princes eux-mêmes m’ont affirmé qu’ils ne descendent pas d’un mututsi». Et Chrétien à son tour écrit que « les traditions orales les plus largement répandues …donnaient au fondateur de la dynastie, Ntare Rushatsi, une origine méridionale…et n’excluaient pas une appartenance hutu. Sous l’influence conjuguée d’un grand chef du Nord-Ouest, Pierre Baranyanka, et de l’évêque Julien Gorju…tous deux fascinés par la culture rwandaise, une autre version est officialisée, à coup de bricolage des sources et même de pressions sur certains informateurs : elle donne au roi fondateur une origine rwandaise et tutsi, fondant en quelque sorte les lettres de noblesse de l’aristocratie dynastique burundaise. (27»

3. La judaïsation des Tutsi, stade ultime de l’idéologie hamitique.

Nos l’avons dit : le terme hamitique a subi des déformations philologiques, des assimilations linguistiques et des manipulations idéologiques(28). Mais alors qu’on pensait l’idéologie hamitique en voie d’extinction sous sa forme explicite, elle est en train de resurgir sous une forme que certains n’hésitent pas à présenter comme une nouvelle stratégie d’exploitation de l’Afrique, celle des Grands Lacs en particulier.

3.1. Havila : terre des Juifs d’Afrique ou une idéologie de l’occupation?

Le 18 mars 2000, Grands Lacs Confidentiel (29) titrait ainsi un article signé de Erik Kennes : « Judaïsation des Tutsis : identité ou stratégie de conquête ? » L’auteur notait que « depuis un certain temps, une nouvelle identification sociale est née chez les tutsi du Rwanda, du Burundi et de l’Ouganda. La réclamation d’une identité juive, les tutsi hébreux, fait certainement son bonhomme de chemin et de façon non hasardeuse. ». Cette identification aurait déjà des échos en Israël, puisque, dit Kennes, le Jerusalem Post du 23 novembre 1998 aurait écrit : « Nous lançons un appel à Israël et à la communauté internationale pour condamner et prendre des actions contre toute violence anti-israélite perpétrée par des non israéliens à travers l’Afrique, y compris plus de 500.00 tutsis-hébreux israéliens au Rwanda. . » L’auteur souligne que « Havila est le mot attribué à la région des Grands Lacs par ce mouvement de la judaïsation des tutsis ». Institut, centres de recherche et manifestations sont voués, dans la discrétion, à la promotion de l’identité des tutsis-hébreux. Erik Kennes signale l’existence de 7 centres de recherche liés à « l’Institut des Grands Lacs » qui regrouperait « dans la plus grande discrétion les plus grands intellectuels tutsis à travers le monde ».

L’objectif commun de ces centres serait de restituer et de faire revivre la « mémoire perdue des douze codes hébraïques qui ont caractérisé depuis des millénaires, la civilisation des peuples kushitiques de l’Abyssinie méridionale (Rwanda, Burundi, Buha,Ankole, Buhavu etc.) et gardiens des mines du roi Salomon ». Kennes détaille les missions de chacun des 7 centres. Ainsi , le Centre Gédéon serait chargé de la sécurité et de la stratégie, le centre roi Salomon des analyses économiques et financières, le centre Hakim de la médecine , des sciences naturelles, de l’écologie et des écosystèmes dans Havila ; le centre Mulenge de la maîtrise des nouvelles technologies de la communication, de la documentation et des archives cruciales relatives à Havila. Le centre ISHMGO appuierait Mulenge en logistique et s’occuperait de la muséologie de Havila, des manifestations culturelles et folkloriques ainsi que de la « fabrique d’Ishango » au sein de laquelle les artisans reconstitueraient l’art et l’artisanat salomonique de Havila. Le centre Techouvhah s’occuperait de la connexion mémorielle des peuples shébbatiques du Nil Blanc et du Nil Bleu (Ethiopie, Somalie, Erythrée, Ogaden, Ghana, Nigeria) etc. Le centre Sacega s’occuperait du souvenir de l’institution du bâton de justice et du gouvernement dans Havila…par rapport à la mémoire de l’antique Israël, dont ils gardent … les codes salomoniques et mosaïques…dans des traditions multi-séculaires. Enfin, le centre Bilkis-Reine de Saba s’occuperait de l’analyse et de l’intervention politique et diplomatique concernant les peuples de Havila.

Le texte mentionne également l’organisation, du dimanche 24 octobre au mardi 2 novembre 1990, à Aguleri, dans l’Igboland au Nigeria, d’un festival tutsi « célébrant la réunification physique des tribus perdues de Havila, de Guihon (Ethiopie, Somalie, Erythrée, Ogaden, Ghana, Nigeria ) et du Fouta Djalon. » Les organisateurs auraient été l’African Hebrew Organisation, le King Solomon Sephardic Federation et le Groupe Industriel RIVKIN TECHNOLOGY.

L’auteur cite comme ténors de la conférence le professeur Jean Bwejeri, linguiste, l’avocat Mathias Niyonzima du barreau de Bruxelles et professeur de droit à l’Université de Nantes, le capitaine Ciramunda Richard-Delvaux, criminologue et stratège de Havila, Gaspard Kirombo, lauréat de la faculté des Sciences politiques et sociales de l’UCL, coordinateur du centre Mulenge et modérateur de la conférence inaugurale. A ceux-là s’ajoutent le professeur Alexandre Kimenyi(USA), Déogratias Bugera, Bizimana Karahamiheto et Jérôme Gapangwa Nteziryayo, évêque d’Uvira, docteur en histoire ecclésiastique.

De la lecture des écrits des promoteurs de Havila dont le siège est à Bruxelles, en Belgique, il se dégage un certain nombre de principes à la fois antidémocratiques et proches d’un essentialisme fixiste dont le raciste le plus simple d’esprit peut faire un fonds de commerce. En effet, derrière l’obsession des traditions se cache ici l’idée d’une perfection immémoriale et définitive. De même le paradigme monarchiste propre à Havila dont le chef, Jean Bwejeri, se dit prince de Nkoronko ; la mystique raciale tendant à promouvoir un culte des Tutsis, le mythe d’un passé codé sacralisé mais manipulable à souhait, tout cela amène à se demander si Havila n’est pas une école de racisme, un virus idéologique des plus dangereux. Quand par exemple J. Bwejeri écrit dans un article intitulé « Havila et les Tutsi hébreux » que « Durant les quarante dernières années, les Batutsi ont été exterminés et sont encore en train d’être exterminés, à cause de leur identité hébraïque et de leur héritage salomonique » par qui voudrait-il être pris au sérieux ? Peu lui importe : l’assimilation des tutsis à des victimes d’un nazisme et d’un antisémitisme africains est en marche.

3.2. Recherche de fraternité ou moyen de division et d’exploitation ?

Derrière les proclamations d’une fraternité entre les Tutsi et les Juifs, certains voient la poursuite du dessein consistant à diviser les Africains pour mieux les exploiter. Car, se demandent-ils, en quoi un Tutsi est-il plus frère d’un Juif que d’un Africain qui partage avec lui la vie quotidienne et le passé récent ? Il s’agirait plutôt d’une manipulation idéologique, visant à utiliser certains groupes ethniques, à les dresser contre d’autres africains en leur donnant une origine extra-africaine, noble, supérieure. Comme hier les Tutsi, les Galla, les Hima, les Peuls, les Lemba etc. furent dits des Hamites, des blancs dans la peau noire, aujourd’hui, les mêmes, avec des Nigérians, des Ghanéens etc. sont en voie d’être rebaptisés Juifs. Des informations dignes de foi font penser que les Fangs d’Afrique centrale sont également visés par ce projet de judaïsation.

De même qu’Edith Sanders, en 1969, voyait dans le hamitisme une idéologie destinée simplement à rationaliser l’exploitation de l’homme noir et à spolier le continent (30), Kennes voit derrière la prétendue volonté de retrouvailles fraternelles un projet de mainmise économique sur les ressources de la région des Grands Lacs, à partir de l’instrumentalisation des Tutsi et des autres ethnies rebaptisées juives pour les besoins de la cause. « Les maîtres à penser de cet empire (Hima-Tutsi) sont des personnes hautement instruites, qui ont tissé des relations avec certains groupes juifs et plusieurs partenaires occidentaux qui leur permettent de réaliser leur projet au prix des richesses abondantes dont regorgent ces Etats ».Il s’agirait donc de la complicité des certaines élites africaines avec des multinationales étrangères pour piller l’Afrique. Erik Kennes cite par exemple le projet Solomon Pipeline de la compagnie Westrac qui viserait à donner gratuitement à Israël l’eau du fleuve Congo. Dans certains écrits quelques idéologues de Havila affirment que le roi Salomon leur a donné en héritage la région des Grands Lacs et que les Bantous sont des immigrés à titre précaire. Qu’ils n’ont qu’à se soumettre aux lois des maîtres du pays ou partir ! De même, en se proclamant gardiens des mines du roi Salomon, ils chercheraient à justifier le pillage des minerais de la région.

Mais encore : à y regarder de près, les derniers développements de l’idéologie hamitique tutsie judaïsante sont une insulte pour les Tutsis et pour le bon sens. Les pseudo savants de la patrie Havila proclament en effet que la religion tutsie est un monothéisme en rapport avec le modèle mosaïque de la dix-huitième dynastie d’Egypte, que le système juridique doit être l’exacte copie du code déteuronomique, que le Tutsi doit être monarchiste politiquement, et qu’il doit être gardien de vache puisque tutsi veut dire d’après le prince de Nkoronko « ceux dont l’occupation permanente est de conduire le bétail au pâturage ». Bref les Tutsi n’auraient pratiquement plus rien à inventer et n’auraient qu’à se tourner vers leurs savants, qui, organisés en brillants centres de recherches se sont donnés la mission d’exhumer les trésors de leur humanité et de leur restituer l’intégralité de leur mémoire perdue. Seulement, hélas, au prix de quels abandons et de quels risques ? Et quand Jean Bwejeri, le prince de Nkoronko, écrit une œuvre intitulée : Les Batutsi II. L’histoire confisquée il ne croit pas si bien dire. Seulement ce qu’il n’avoue pas, c’est que ce n’est pas l’historiographie classique qui a confisqué cette histoire, c’est lui et ses chercheurs, qui, ô paradoxe fratricide ! veulent enfermer les Tutsis dans le passé en en faisant des momies dorées. A se demander si les patrons de Havila aiment les Tutsis…

4. Comprendre et agir

Le mythe des origines et l’idéologie hamitique sont une entreprise délibérée visant à affaiblir l’Afrique pour l’exploiter facilement. Ils se servent d’un racisme anthropologique , social et culturel ainsi que d’une falsification de l’histoire africaine pour dresser les africains les uns contre les autres. D’où la nécessité d’engager une action pour démasquer et neutraliser ses avatars et réconcilier les africains , singulièrement ceux des Grands Lacs autour de l’idée d’un destin commun.

4.1. Par-delà les fausses généalogies, les vraies parentés.

L’analyse historique de cette idéologie nous ramène au constat que les pasteurs de l’Afrique des Grands Lacs sont des Bantous, parlent des langues bantoues. Ils ne constituent pas une race à part. De plus, les pasteurs de l’Afrique des Grands Lacs ne sont pas tous des Tutsis ou des Himas. Des Bashis, des Hutus etc. ont élevé du bétail en combinaison avec l’agriculture.

En outre les aristocraties de cette région ne sont pas issues d’une immigration blanche mais d’une différenciation socioprofessionnelle locale.

Et contrairement à l’idée courante les vocables Hutu, Tutsi, Hima, Twa etc. ne désignaient pas originairement des ethnies culturellement distinctes les unes des autres, mais des clans ; c’est-à-dire des communautés issues d’un même ancêtre connu : Muhutu, Mututsi, Muhima, Mutwa etc., cela n’excluant nullement un ancêtre commun avant la spécialisation professionnelle relative des uns et des autres. Le fait que Hutus, Tutsis et Twas, Himas aient des noms de lignages communs pourrait plaider dans ce sens.

De plus, les différences morphologiques observées ne relèvent pas de caractères raciaux génétiquement figés mais de divers facteurs : alimentaires notamment.

Par ailleurs les ressemblances morphologiques entre pasteurs d’Afrique dues surtout à l’alimentation ne font pas d’eux des parents proches tout comme elles ne créent aucune affinité culturelle directe : on l’a vu notamment à propos des Gallas et des pasteurs des Grands Lacs.

L’idéologie raciste plaquée sur la région a eu pour effet de diviser artificiellement ses peuples en races différentes, hiérarchisées, dont certains pasteurs faussement affublés d’une ascendance blanche constitueraient l’élite prédestinée à gouverner les nègres en coopération avec le colon.

Pour le Burundi par exemple, l’amalgame hamitique a fait que la dynastie des Baganwas, traditionnellement de souche hutue soit reclassée tutsie et d’origine étrangère pour la simple raison qu’elle avait du bétail et des pouvoirs. Les Bahimas furent rebaptisés Batutsis alors que c’étaient des Bahimas c’est-à-dire descendants de Muhima et non de Mututsi. Des Hutus riches et qui avaient du bétail, voyant que les colons appelaient Tutsis les riches, les puissants et les nobles, revendiquèrent et acquirent le titre de Tutsi. Le paradoxe aujourd’hui est que les Bahimas qui depuis 1966 se disent les porte-flambeau de la noblesse tutsie du Burundi ne sont même pas des Batutsis au sens authentique du terme et qu’avant la colonisation ils étaient plutôt un clan méprisé, à part quelques lignages. Le mot Tutsi, au départ synonyme de descendant de Mututsi est venu signifier pasteur, riche, noble, Blanc dans une peau noire. Et, suite aux manipulations coloniales le mot Hutu a été assimilé à tort à serviteur, esclave alors que les termes umusuku, umuja exprimaient adéquatement ces statuts. Cette œuvre de faussaire a fini par fragmenter, pétrifier et polariser la société.

4.2. L’idéalisation des Tutsis et la diabolisation des Hutus : un même piège

Nous avons vu plus haut à quel point une certaine littérature a adulé et porté aux nues la beauté et les qualités des Tutsis. Encore aujourd’hui la presse occidentale manifeste une sensibilité très inégale devant la mort des Hutus et des Tutsis. Autant le génocide des Tutsis du Rwanda fait l’objet d’une commémoration quasi religieuse, autant les trois millions de congolais emportés par l’agression rwando-ougandaise et les milliers de Hutus rwandais massacrés par le FPR sont l’objet d’un oubli ordinaire. Ils sont « banalement mortels ». Et une habitude atypique mais calculée s’est installée dans certains journaux de parler d’extrémistes, de génocidaires Hutus, tendant à enraciner dans les esprits que Hutu rime avec crime, violence, méchanceté, génocide. Cette diabolisation de toute une communauté est non seulement intolérable mais relève du dessein inavoué d’empêcher la réconciliation et la bonne cohabitation des Hutus et des Tutsis. Se prêter à une telle entreprise c’est se faire le complice actif d’un racisme sournois qui sous-entend qu’il y a un « esprit Hutu » et un « esprit Tutsi ». Ce n’est pas en tant que Hutu ou Tutsi que le méchant ou le juste l’est.

Mais la diabolisation des Hutus et l’oubli du génocide des Hutus du Burundi en 1972 (voyez son absence cruelle dans le numéro 76 de Manière de voir, Bimestriel du Monde Diplomatique, sur Les Génocides dans l’histoire !) d’une part et d’autre part l’idéalisation des Tutsis ainsi que la sur-médiatisation du génocide rwandais de 1994 ne doivent pas faire croire aux Tutsis qu’ils sont tous choyés par les puissants de ce monde. Les Tutsis du Rwanda ont été abandonnés dans la détresse la plus extrême parce que « cela arrangeait » certains intérêts.

Les idéologues qui se proclament les champions des Tutsis se servent de leurs frères comme prétexte politique. Ils sont prêts à les abandonner à la misère et aux massacres pourvu que leurs intérêts et leur pouvoir soient préservés. Dans un témoignage de plus de trente pages, un ancien militaire du Front Patriotique Rwandais, ABDUL RUZIBIZA a décrit comment le FPR et son armée patriotique ont abandonné les Tutsis de l’intérieur en proie au génocide et refusé de les secourir alors qu’ils en avaient les moyens(31). Il écrit notamment, en grands caractères : « KAGAME NOUS A EMPECHE DE VENIR EN AIDE A NOS PARENTS ALORS QUE NOUS EN AVIONS LA CAPACITE ET LA VOLONTE. » Il ajoute: « Un Tutsi a fourni aux tombeurs des Tutsi le prétexte de les exterminer et les a délaissés après. » Et plus loin : « …Kigali comptait plus de 12000 hommes de troupes Inkontanyi et les Tutsi continuaient à être massacrés partout…Il n’était pas question pour ces militaires d’aller au secours des gens, parce que Kagame ne l’avait pas spécifié dans les ordres qu’il avait donnés.» Un autre témoignage d’un militaire qui a évolué dans les services de renseignement du Général Kagame et dans sa garde rapprochée, le ‘ second lieutenant ‘ Aloys Ruyenzi, matricule OP 1460, est tout aussi révélateur. Au point 32 Ruyenzi,écrit, très amer : « Il n’épargna pas ses propres frères tutsi. Bagogwe et Banyamulenge du Zaïre furent tués pour sauvegarder ses intérêts personnels. (32)»

En les présentant comme les perles sacrées de l’Afrique l’idéologie hamitique a séparé les tutsis de leurs frères, en les dressant contre eux. Ils sont tout comme les Hutus, des victimes de cette supercherie. Et la recherche légitime des racines, à défaut d’aboutir scientifiquement sur l’unité de la race humaine, ne devrait pas conduire à la création et à l’entretien de ghettos idéologiques, rendant l’Afrique encore plus vulnérable à certaines multinationales dont le profit est le seul frère et ami. Et qu’on le veuille ou non, chaque fois qu’un peuple se dit supérieur, élu et d’une pureté immaculée, cela sonne comme un défi, une provocation pour les autres considérés, certainement à tort, comme recalés par Dieu... C’est donc ensemble que Hutus, Tutsis et Himas ont à lutter contre ce qui en Afrique des Grands Lacs continue d’oblitérer leur fraternité.

4.3. Combattre activement l’idéologie hamitique

Si l’on fait le bilan des pertes humaines causées par l’exacerbation de cette idéologie, on comprend la nécessité et l’urgence d’une lutte déterminée contre ce fléau. Après les génocides du Burundi(1972) et du Rwanda(1994), la responsabilité de la communauté internationale n’est pas seulement de juger et sanctionner les coupables : elle doit s’appliquer aussi à inventorier les formes directes et indirectes de ce racisme, identifier les institutions, les compagnies, les publications et les auteurs qui les véhiculent, adapter les législations et prendre des sanctions qui s’imposent.

L’autre arme contre le racisme hamitique est une éducation avisée des jeunes qui les mettrait à l’abri des travers ethniques et racistes. Et c’est là la responsabilité des pouvoirs publics, des autorités religieuses et des médias qui, directement ou indirectement, façonnent les consciences et les opinions. L’éducation civique des enfants devrait mettre résolument l’accent sur la tolérance des différences, sur la richesse de la diversité et montrer l’universalité de l’humain par-delà les particularités culturelles.

Selon toute vraisemblance les pouvoirs oligarchiques sécrètent l’élitisme négatif, le népotisme et le racisme ethnique. Seul un régime démocratique peut dissiper les manies aristocratiques figées et cultiver une citoyenneté tolérante et créatrice. On entend encore des défenseurs discrets mais têtus de l’oligarchie dire que la démocratie n’est pas une panacée, qu’on a vu dans l’histoire des « dictatures démocratiques » ou « des démocraties tyranniques » Certes, mais si un régime issu des urnes peut décevoir , se corrompre et devenir odieux , cela ne disqualifie pas pour autant la vraie démocratie, mais engage plutôt à prendre des mesures de sauvegarde.

Conclusion.

L’étude du mythe des origines et de l’idéologie hamitique nous a donné l’occasion de montrer l’inconsistance de la théorie des climats, du déterminisme géographique, ainsi que du racisme qui expliquent les différences socio-culturelles par l’impact du climat ou de l’hérédité génétique. Elle nous a également permis de comprendre que les Hébreux ont forgé la malédiction des Cananéens, des Egyptiens et des Noirs pour s’en servir comme arme idéologique. La tradition judéo-chrétienne faisant des Noirs des êtres maudits justifiera l’opprobre historique jetée sur eux dans l’esclavage et la colonisation.

Au dix-neuvième siècle, le hamitisme prendra un tour nouveau. En effet, choqués de découvrir, suite aux conquêtes napoléoniennes, à l’égyptologie et au déchiffrage des hiéroglyphes que l’ancienne civilisation égyptienne était l’œuvre d’Africains noirs, les racistes et colonialistes européens trouveront en Gobineau un grand maître à penser. Désormais Cham n’est plus un Noir maudit avec toute sa descendance, mais un Blanc qui par le sacrifice de sa race s’est mêlé aux Mélaniens, leur transmettant par son sang, leur part d’intelligence, de civilisation et de beauté. Toutes les civilisations africaines seront désormais réputées chamitiques, œuvres de Blancs à peau noire.

L’Afrique des Grands Lacs sera un champ privilégié dans l’implantation de l’idéologie hamitique. Située dans le prolongement géographique de l’Egypte et en amont du Nil, cette région va à la fois fasciner et être victime de manipulations falsificatrices de son histoire, de sa sociologie politique et de son anthropologie. Un coin idéologique a été enfoncé entre les filles et fils d’Afrique tendant à amputer ce continent d’une partie de ses ethnies, de son phénotype jugé caucasien, et plus récemment, juif. A force d’être magnifiées, flattées, favorisées parfois par les colonialistes racistes, certaines élites tutsies et himas ont été prises au piège d’une idéologie qui se sert d’eux pour diviser et dominer l’Afrique. Mais au regard des violences qu’a entraînées le mythe de la spécificité et de la supériorité tutsie, il est du devoir des intellectuels, des politiciens, des éducateurs, des chefs religieux et des organisations anti-racistes de combattre ce virus qui est, disons-le, une arme de destruction massive. Réaliser la fraternité des Hutus, des Tutsis et des Himas dans la famille bantou, c’est en même temps réaliser la fraternité humaine. A cette fin Havila et ses structures constituent un obstacle à lever.

Dr Lazare Ndayongeje, Directeur de Programme,
Politique & Géopolitique Burundaise,
Burundi Réalités International (BRI Inc.)
Contact :
http://www.burundirealite.org/

Notes et références bibliographiques
1. ARISTOTE.- La physique, Livre IV, 1, Ed. Les Belles Lettres, pp.. 123-124.
2. EINSTEIN, Albert.- La relativité, Payot, 1978, pp...156-159.
3. DESCARTES, René. -Principes de la philosophie(1644), IIème partie, articles 10 et 11.
4. BODIN, Jean.- La république, Livre V (1576) cité par Jean Jacques Chevallier, Les grandes œuvres politiques, de Machiavel à nos jours, Armand Colin, Paris, p. 101
5. MALSON, Lucien.- Les enfants sauvages, (1964), Edit. 10/18, 1977, pp.9-10
6. CARREL, Alexis, L’homme cet inconnu
7. DRAKE, Saint-Clair.- « Détruire le mythe chamitique, devoir des hommes cultivés », in Présence Africaine, 24-25, 1959, p.p. 215-230
8 . MANIRAGABA , Balibutsa. -Une archéologie de la violence en Afrique des grands Lacs, Editions du Ciciba, Libreville, 1999 , p.p. 161-162
9. SANDERS , E. R.- “The hamitic hypothesis, its origin and fonction in time perspective” in Journal of African History, (1), 1969, p.521 et ss
10.MANIRAGABA , Balibutsa.- « La dérive herméneutique sur « ham » dans les traditions judéo-chrétiennes », in Une archéologie de la violence en Afrique des Grands Lacs, Ed. du Ciciba, Libreville 1999, p. 171
11. MANIRAGABA , Balibutsa.- « Le racisme anti-noir chez les philosophes des Lumières » in OP. cit. p.p. 183-197
12. GOBINEAU , Arthur.- Essai sur l’inégalité des races humaines, Œuvres complètes de Gobineau, I, Gallimard, 1983, p. 347
13. GOBINEAU, Arthur.- Op. cit. P.341
14. DRAKE, Saint-Clair.- Article cité, p.219-220
15.JOHNSTON, Harry.- “A survey of the ethnography of Africa and the former racial and tribal migration in the continent” In The Journal of the Royal Anthropological Institute of Great Britain and Ireland, 43, (1913), p. 375-421
16. BAUMANN, Oscar.- Durch Massai-land zur Nilquelle.p 196. Cité par Maniragaba, B., « L’idéologie hamitique dans la région des Grands Lacs »,In op. cit. p.247
17. CHRETIEN, Jean-Pierre.- « ‘Vrais ‘ et ‘faux’ nègres », in Le monde, 28 juin, 1981
18. RYCHMANS, Pierre.- Grands Lacs, 1936, p.p. 279-280, cité par Chrétien J.-P., « Une révolte au Burundi en 1934 » in Annales E.S.C, p. 1705
19. GORJU , Julien, Mgr.- Entre le Victoria, l’Albert et l’Edouard, Rennes, 1920, p. 155, cité par MWOROHA , Emile.- Peuples et rois de l’Afrique des Lacs, NEA, Dakar-Abidjan, 1977, p. 79
20. CLASSE, Léon ,Mgr.- « Le Rwanda et ses habitants » in Congo, 1922,p.p.677-693
21. PAGES, Révérend Père.- Un royaume hamite au centre de l’Afrique, Mémoire de l’Institut Royal Colonial Belge, I, 1933, Bruxelles, p. 5
22. DEL PERUGIA, Paul.- Les derniers rois mages, Ed. Phébus, Paris, 1978, p.p. 35-36
23. KAGAME , Alexis, Abbé.-« Les hamites du Rwanda et du Burundi sont-ils des Gallas ? », in Bulletin des séances . Académie royale des sciences coloniales. Nouvelle série, 2, 1956, Bruxelles, pp.314-365
24. GORJU, Julien, Mgr.- Face au royaume hamite du Rwanda, le royaume frère de l’Urundi, Bibliothèque du Congo, N.S. N° 3, Bruxelles, 1938, p. 7-8
25. GORJU, Julien, Mgr.- op. cit. pp. 9-11
26. Idem, p. 12
27. CHRETIEN , Jean-Pierre.- Burundi. L’histoire revisitée. 25 ans de métier d’historien en Afrique. Ed. Karthala , paris, 1993, p. 325
28. MANIRAGABA, Balibutsa.- « Les manipulations étymologiques des termes « ham », « hamitique » l’idéologisation de la philologie » in op. cit. pp.154-240
29. KENNES, Erik.- «Judaïsation des Tutsi : identité ou stratégie de conquête ? » in Grands Lacs Confidentiel, 18 mars 2000. Voir aussi : « Mouvement d’extrême droite Burundaise : Comment pouvons-nous comprendre Havila ? » sur www.burundi-sites.com/agnews-havila.
30. SANDERS, E.R. Article cité, p. 532
31. RUZIBIZA , Abdul.- Témoignage visant à démontrer comment le gouvernement rwandais et le FPR sont responsables des erreurs qui ont rendu possible le génocide. Est-ce que le FPR est venu secourir les Tutsis comme on nous l’a souvent répété ?
32. RUYENZI, Aloys.- Major General Paul Kagame behind the shooting down of late Habyarimana’s plane : an eye witness testimony . Contact : aruyenzi2000@yahoo.com

Tuesday, September 11, 2007

Twagiramungu Noheli: Umuzi n_umuhamuro w_imiryane mu Rwanda n_ingamba zo kuzahura igihugu



Umuzi n’umuhamuro w’imyiryane mu Rwanda
N’ingamba zo kuzahura igihugu

Noheli Twagiramungu[1]

UMWANZIKO

Iyi nyandiko igamije gutanga umusanzu w’ibitekerezo mu biganiro bihuza Abanyarwanda basesengura kandi bashakira umuti imvano n’ingaruka z’imyiryane yazahaje igihugu cyacu. Nkuko mbisobanura mu ngingo zikurikira, Abanyarwanda benshi bakeneye kubaho neza no kubana mu bwisanzure, ubwuzuzanye, ubusabane n’amahoro arambye. Ariko ibyo byarananiranye kubera ko igihugu gikomeza kugirwa ingaruzwamuheto y’ingoma z’ibinani, zishyira imbere ubwidishyi, ubwikanyize bw’utuzu twubakiye ku moko n’uturere, zikishingikiriza inkunga ya ba Mpatsibihugu bagenda basimburana uko zihinduye imirishyo.
Iki kiganiro ndagishingira ku ngingo eshatu z’ingenzi: Uko abanyarwanda basobanura iby’ingoma y’ubwidishyi; imiterere y’ingoma y’ubwidishyi bw’utuzu mu Rwanda rwa kera n’urw’ubu; uburemere bw’ibibazo by’ikandamiza n’imyiryane ishingiye ku moko. Ndasozereza ku ngamba zadufasha gusohoka muri iyo myiryane tukubaka inzego z’ubuyobozi zica ubutegetsi bw’akazu kandi zikavana abanyarwanda bo mu moko yose n’ingeri zinyuranye ku ngoyi y’urwikekwe, ubwoba no kwiheba bimaze kuba akarande mu Rwanda.


I. INGOMA Y’UBWIDISHYI: UMUGANI UGANA AKARIHO

Mu mugani w’ingoma y’Abidishyi, Gacamigani atubwira iby’umusore w’igikomangoma wafatanije n’urungano rwe bigarurira ingoma, batsemba abasaza bose bahereye kuri ba Se kugira ngo hatazagira ugerageza kubavuguruza mu byemezo bafata. Umwami mushya w’Abidishyi yaciye iteka ko nta n’umwe ugomba kumuvuguruza, kumugisha impaka cg kumuhinyuza. Icyo avuze cyose yategetse ko bagomba kwikiriza bati “yego Mwidishyi’’. Mu matwara ye mashya, yasanze agomba kwambara ukwe kwa wenyine, nuko ategeka ko bamukanira uruhu rw’imparage bakarumufureba kuva ku mutwe kugera ku birenge. Iby’amategeko arusha amabuye kuremera, abahanga mu gukana bakoze ibyo bategetswe ariko ntihagira umenya cg utinyuka kubwira Umwami ko nibamudoderaho uruhu atabasha guhumeka. Nuko ngo akazuba kave umwami uko uruhu rumukana ati “uruhu rurankana Bidishyi”, bati “Yego uruhu ruragukana Mwidishyi”. Ati “muntabare Bidishyi”, bati ‘nibagutabare Mwidishyi”. Ati “ndapfuye Bidishyi”, bati “urapfuye Mwidishyi”.
Umugani utubwira ko uwo mwami w’abidishyi yaje gukizwa ku bwa burembe n’umusaza wari waracitse ku icumu abikesha umuhungu we wari waranze gukurikiza amabwiriza y’ubwidishyi akamuhisha.
Nubwo umugani w’Abidishyi umaze imyaka amagana wigishwa mu Rwanda, biratangaje kubona abategetsi bakomeje kuyobora U Rwanda ntacyo wigeze ubigisha. Reka turebe muri make uko ingoma ya cyami na Repubulika zayikurikiye zaranzwe n’umuco w’ubwidishyi ushingiye ku bwikanyize bw’ishyaka rimwe ryimakaza akazu gashingiye ku irondakoko no ku muntu umwe w’Ikinani (MDR Parmehutu ya Kayibanda, MRND ya Habyarimana, FPR ya Kagame).

II. UBWIKANYIZE BW’UTUZU

Ingoma ya cyami
Ingoma y’ubwidishyi ijyana ahanini no gutzimbataza ubwikanyize bw’akazu. Nubwo ijambo akazu ryamamaye mu mahindura ya za 1990 ubwo impumeko ya demokarasi yari igarutse muri Afurika, imikorere y’akazu ifite amateka maremare mu butegetsi bwaranze u Rwanda, ikaba ishinze imizi mu mitegekere y’ingoma Nyiginya. Kera ku bwa Kalinga, iyo Umwami yimaga, we n’umugabekazi (nyina) bagombaga gutonesha abo mu miryango yabo, bakanyaga abo batishimiye, bakagabira abo bashatse. Ibi byagiye bitera amakimbirane cyane mu nzu y’ubwami nyirizina (Abanyiginya) n’imiryango y’ibibanda (abega, abakono, abasinga, …). Utuzu dukomeye twashoboye guhigika utundi ku ngoma ya cyami ni akazu k’Abanyiginya b’abahindiro n’akazu k’Abega, ndetse abega b’abakagara baza kwigarurira ubutegetsi ku buryo bugaragara nyuma y’intambara yo ku Rucunshu yakurikiywe n’itikizwa ry’abanyiginya benshi n’indi miryango y’ibikomangoma.
Ingoma ya gikoloni yaje gutiza umurindi ako kazu gahigika abakarwanyaga (nka Rukara rwa Bishingwe na Basebya ba Nyirantwali), kigarurira impugu zigengaga (I Gisaka, u Busozo, u Bukunzi) ari na ko barushaho gufatanya gukandamiza no kurenganya abaturage. Ibi ni byo byaje kuba intandaro y’akaga kakomeje kugwira u Rwanda kugeza magingo aya.

Repubulika ya mbere
Kuri Repubulika ya mbere, guhirika ubwami byakurikiwe n’amatora yagaragayemo amashyaka ane y’ingenzi: MDR Parmehutu, UNAR, Aprosoma, Rader. Ibyavuye mu matora ariko ntibyakomeje kubahirizwa kuko MDR Parimehutu yitiranije “benshi’ na “bose”, ikadukana imigenzereze ya cyami yo kunyaga no kugaba, igahigika abayobozi batowe n’abaturage (Aprosoma, Rader), abandi ikabica (Unar). Muri za 68, umuco wo kugaba no kunyaga warakataje, abatawushyigikiye bahinduka “abataye umurongo”. Ubutegetsi bwarushijeho kugenda bujya mu maboko y’akazu k’abegereye perezida Kayibanda, abenshi bakaba ab’iwabo i Gitarama, mu bakomoka ahandi abenshi bakaba abiganye na we mu iseminari mu Nyakibanda. Mu marembera y’ingoma, abarenze kimwe cya kabiri cy’abaminisitiri bakomokaga i Gitarama, bose ari abahutu bo muri MDR Parmehutu, bose ari abo mu idini rya Gatolika y’i Roma.

Repubulika ya Kabiri
Repubulika ya kabiri yaje ivuga ko izanye “revolisiyo mvugururamuco” kandi ko ije kurwanya “ubwikanyize bwa bamwe”. Imvugo ariko ntiyabaye ingiro. Ahubwo ndetse ubwikanyize bwarushijeho guhabwa intebe, cyane cyane ko ubutegetsi bwari mu maboko y’abasilikali bakomoka mu gace kamwe k’igihugu (Gisenyi-Ruhengeli). Ibintu byarushijeho kuzamba Leta ishyizeho icyo yise politiki y’iringaniza, yabaye ahanini inzira yo gukumira mu mashuri no mu nzego z’imirmo ya Leta abatutsi muri rusange n’abahutu bo mu turere Leta itari yishimiye nka Gitarama.
Igishya cyabonetse kuri iyo Leta ni uguha abatutsi bake n’abantu bo mu yandi madini imyanya ikomeye nk’ubuminisitiri n’ubudepite, gusa nanone ibyo bigakorwa mu buryo busa n’ubwa gihake, hatitawe ku kamaro uhawe umwanya yamarira abo yitwa ko ahagarariye.
Muri za 80, umwuka mubi hagati y’abasilikali bari ku butegetsi watumye bamwe batabwa muri yombi barafungwa (Lizinde, Biseruka,..) abandi barahunga (Kanyarengwe). Ibyo byatumye uturere bakomokamo (Bugoyi, Bukonya, ..)tuvanwa ku ibere , nuko akazu karushaho kwizingira mu gace gato ka Bushiru n’inkengero zayo. Ushaka umwanya muri leta, ushaka kujya kwiga hanze, ushaka inguzayo muri Banki, kenshi byasabaga kunyura ku muntu wizewe wo muri ako kazu, cg umuyoboke wako.

Leta y’inzibacyuho
Mu gihe cy’itambara n’inkubiri ya demokarasi muri za 90, ubwikanyize bw’akazu ka Perezida Habyarimana bwatumye abaturage hirya no hino bivumbura, nuko biba ngombwa ko hajyaho ubutegetsi busaranganijwe hashingiwe ku mashyaka. Icyagaragaye cyane muri ayo mashyaka, ni uko imikorere y’utuzu yarushijeho guhembera ubushyamirane bw’amoko n’uturere. Koko rero, amashyaka yari amaze kuvuka (MDR, PSD, PL, PDC,…) yiremyemo utuzu dushingiye ku moko, uturere n’ubuhunahunnyi bwa bamwe bu bayobozi bayo ku buryo byatumye atagira ingufu zo guha abaturage umurongo uhamye wo kuvanaho ubwikanyize bw’akazu ka MRND no kuburizamo umugambi wa FPR wo gufata ubutegetsi ku ngufu. Ibintu byarushijeho kuba urujijo kuko FPR na MRND n’abayishyigikiye (CDR, Interahamwe, Kangura, La Medaille Nyiramacibiri, Radio LTLM) bashyiraga imbere ibikorwa by’iterabwoba no gukura abantu umutima, ku buryo byageze aho izo mpande zombi ari zo zigarurira urubuga: utari ku ruhande rwa FPR akabarwa ku ruhande rwa MRND; udashyigikiye MRND agashinjwa gucudika na FPR. Ni muri urwo rujijo kwica Perezida Habyarimana n’abafasha be byahaye abari bafite inyungu muri ako kaduruvayo gukora ibyo bari bamaze igihe bagambiriye: Interahamwe n’abambali bazo babona umwanya wo kurimbura abatutsi n’abo bitaga “ibyitso by’Inkotanyi”; Inkotanyi zibona urwaho rwo gutikiza abo zishatse no kwifatira ubutegetsi nta nkomyi.

Ingoma ya FPR Inkotanyi
FPR itera u Rwanda muri 1990 yavugaga ko ije kurwanya ubutegetsi bw’igitugu, gufatanya n’abandi banyarwanda gushimangira demokarasi no gukemura ikibazo cy’impunzi. Ntabwo ariko imvugo yabaye ingiro. Aho ifatiye ubutegetsi ku ngufu, yashyizeho guverinoma yise iy’ “ubumwe bw’igihugu” itararengeje umwaka kuko abari bayirimo bagerageje kurwanya ubwikanyize bwa FPR bayirukanywemo, bamwe barameneshwa abandi ndetse baza kwicwa. Amashyaka yariho yabujijwe gukora no kongera kugirana imishyikirano n’abaturage; amashya mashya yangiwe gukora; hirya no hino abantu bagerageje kwamagana akarengane baraatotezwa, bakicwa se, abandi bagafungwa abandi bakameneshwa. Byaje kugera aho abayobozi b’amashyaka FPR idashaka ibafunga cg ikabasimbuza abo yishakiye, bigeze aho ifata icyemezo cyo kurema Ihuriro itegekeramo ayo mashyaka atagira abayoboke ndetse isesa ayo yatinyaga ko azazuka (MRND na CDR) n’iryayiryaga isataburenge (MDR).
Imaze gukemura ikibazo “cy’abahutu babi” -- ni ko abambali bayo bavuga--; akazu gashya karushijeho kwisuganya, gatangira kwigizayo abo kita “abatutsi b’indashima’’, abo bakaba ahanini ari abageragezaga kuvugira abacitse ku icumu bavuga ko ntacyo Leta ikora kigaragara mu kubafasha.
Ibyo byagaragaye cyane muri za 1998-2000 kugeza aho abayoboraga IBUKA bayinyazwe ku mugaragaro, bamwe bakameneshwa, abandi bagahitamo kuyoboka. Abandi akazu ka FPR kibasiye n’abatinyutse kunenga igitugu no kwivanga kw’igisilikali mu buyobozi bw’inzego zose z’igihugu no guha imyanya abahunahunnyi n’inkomamashyi zitagize icyo zishoboye. Abo barezwe ko bigira Nyirandabizi (intellectuals), ko ari abo kuvuga gusa batazi urugamba rwo kubohoza igihugu icyo ari cyo.
Uko ibintu bimeze uyu munsi, igihugu kiyobowe n’akazu ka FPR gashingiye kuri Kagame n’agatsiko gato k’abasilikali n’abasivili bavanye Uganda, kakabamo abatutsi b’inkomamashyi barimo abavuye za Burundi, Zayire n’abahoze mu Rwanda, kakabamo nanone abahutu bitwa “ibikingamuyaga” biganjemo abamaze gukorerwa amadosiye yo gufungwa igihe cyose baba birengeje bakibagirwa ikibahatse.

III. IKANDAMIZWA N’UBUSHYAMIRANE BW’AMOKO

Nta wavuga umuzi n’umuhamuro w’imyiryane mu Rwanda atavuze ikibazo cy’ikandamizwa n’imyiryane y’amoko kuko ari byo bimaze kuba akarande mu Rwanda. Koko rero, twabishaka tutabishaka, amoko Hutu, Tutsi, Twa, kubikura mu mpapuro ziranga abanyarwanda, cg se kwiyambura ubunyarwanda ugafata indangamuntu y’ubwenegihugu bundi ntabwo byasibanganya inkovu z’ibikomere icyapa cy’ubwoko Tutsi cg Hutu cyadusigiye. Izo nkovu ziri ukwinshi: ingoyi, ipfunwe n’agasuzuguro, incyuro mbi, ibiboko n’uburetwa, ubuhunzi, ubupfubyi n’ubucike, intambara no kurara rwatambi, uburoko, …
Muri make, ikibazo cy’ikandamizwa ry’amoko cyatangiye ku ngoma ya cyami, gikuririzwa n’ubukoloni, kigumya guhemberwa nyuma y’ubwigenge kugeza ubwo gikuruye intambara n’itsembabwoko muri za 90, ubu akaba ari nacyo FPR yubakiyeho politiki yayo yo gutera ubwoba abatutsi no kubuza uburyo abahutu mu izina rya “jenoside n’ingengabitekerezo ya jenoside”.

Ku ngoma ya cyami n’igikoloni
Ikibazo cyatangiye ubwo ingoma nyiginya yari imaze gushinga imizi (ku ngoma ya Ruganzu Ndoli ahayinga 1600). Icyo gihe imiryango ikomeye yiremyemo itsinda ry’imfura zitwa Abatutsi, batangira kugira imvugo, imyitwarire n’imigenzo ibatandukanya cyane na rubanda rwa giseseka, rwaje guhabwa izina rukomatanyo ry’Abahutu. Abo Batutsi batangiye kwemeza abandi banyarwanda mu migani n'izindi nganzo zinyuranye ko Gatutsi ari we wahawe n’Imana ubutware kubera ubwenge bwe n'ubwihangane, Gahutu ahabwa imbaraga zo gukora no guhakwa, naho Gatwa ahabwa ubwenge-twa bwo gusabiriza no gutera amashyengo. Iyo umuntu usanzwe wo muri rubanda yabaga akoze ibikorwa bitangaje cg se agize ubutoni bw’akadasohoka kuri Shebuja, yakorerwaga umuhango wo kwihutura (kwiyambura ubuhutu), we n’umuryango we bagahabwa icyicaro mu mfura z’abatutsi.
Mu gihe cya gikoloni, Iyi mitekerereze yaje kurushaho gutsimbatazwa, byemezwa ko Gatutsi yavukiye gutegeka, ndetse ahabwa inkomoko ya kizungu (origine hamite). Musenyeli Class na bagenzi bagize uruhare mu gutsimbataza iki gitekerezo, ibuku (irangamuntu) irabishimangira, ndetse n’impuguke z’abanyarwanda nka Alegisi Kagame (cyane cyane mu bitabo Inganji Kalinga na Isoko y’amajyambere) barabyamamaza.

Repubulika ya mbere
Akarengane gashingiye ku kwimakaza imfura z’abatutsi no gupyinagaza rubanda ni ko kabaye imbarutso ya revolusiyo ya 59 ari na yo yaje kuvanaho ingoma ya cyami yimika repubulika iyobowe n’abahutu bake bari barashoboye kugera mu ishuri no kumenya ibya ruzungu. Revolisiyo ya 59 yadukanye intero nshya ngo “Gahutu yaratsinze’’.
Burya koko ngo uwarose nabi burinda bucya. Intsinzi ya Gahutu ntiyagarukiye mu kwigobotora ingoyi ya Gatutsi gusa. Yabaye intsinzi yo kwihimura kuri Gatutsi ndetse no kumwambura ishema n’agaciro nk’umuvukarwanda. Byarushijeho gukomerera uwitwa umututsi kuko ishyaka ryatsinze ryitwaga Parmehutu, bikumvikana ko utari umuhutu iyo ngoma nshya ya Repubulika nta mwanya yari ayifitemo. Ibi byaje kuba ihame nyuma y’aho bamwe mu bahunze bafataga intwaro bakagaba ibitero bitwa Inyenzi guhera muri za 1963. Ibyo byahaye Parmehutu urwaho rwo guca andi mashyaka byari bihanganye, bamwe mu bayobozi bayo bicwa bataburanye, abandi barayoboka irabahaka. Ibyo byakurikiwe no gutoteza abatutsi basigaye mu gihugu—abenshi ari abaturage batigeze bumva n‘umulishyo wa Kalinga bitirirwaga--, hamwe baricwa, ahandi bakurwa mu byabo bacirwa i Nyamata mu Bugesera, abasigaye batangira kurira ku mpembyi biteguye kwicwa igihe cyose Inyenzi zaba zongeye gutera u Rwanda.

Repubulika ya kabiri
Iyo nkeke yo guhora abatutsi biteguye gutotezwa yongeye kurushaho kwiyongera muri za 72-73 ubwo agatsiko k’abasilikali b’abatutsi i Burundi barimbaguraga ibihumbi by’abahutu, ibyo biha urwaho abasilikali bo mu Rwanda gushoza imvururu zibasira abatutsi ari nabyo byabahaye uburyo bworoshye bwo gufata ubutegetsi. Nubwo ubutegetsi bushya bwa Habyarimana butemereye abatutsi bari barahunze gutaha, ndetse hakajyaho n’iringaniza rizitira abatutsi mu mashuri n’imirimo ya Leta, muri rusange habaye agahenge. Gusa ibyo byabaye iby’akanya gato, kuko kuva Inkotanyi ziteye muri 90, abatutsi basubiye ku kabo, ari uzi iby’inkotanyi, ari n’utarazumva, bose bashyirwa mu gatebo kamwe, byemezwa ko abatutsi bose bafite umugambi wo kugarura ubwami bagakandamiza Gahutu. Ibyo ni nabyo byaje kuba intandaro y’umugambi mubisha wo kurimbura inyoko y’abatutsi muri 94.

Intsinzi y’Inkotanyi
Kurimbagura abatutsi b’inzirakarengane hirya no hino mu gihugu aho guca intege Inkotanyi nkuko Interahamwe n’abari bazihishe inyuma babyibeshyaga, byahaye Inkotanyi amahirwe yo kugera ku mugambi wazo wo gufata ubutegetsi mu nzira y’ubusamo. Byarushijeho no kuziha impamvu yoroshye yo gusobanurira amahanga intambara yazo, ndetse no korosa cyangwa koroshya ubwicanyi n’ibindi bikorwa mburabuntu zakoze kuva muri 90 kugeza magingo aya.
Ibyo byanabaye intandaro yo gusiga abahutu aho bava bakagera icyaha cyo kurimbura abatutsi. Umusenateri wa FPR yagize ati “ Abahutu bose barishe, n’utarishe yagize ngo ‘awa”. Mu kurushaho kuremereza icyaha rukomatanyo, Leta ya FPR yaboneye abahutu ikindi kirego cyitwa “ingengabitekerezo ya jenoside’’, bikavuga ko n’utarakoze jenoside, imbuto yayo ayifite mu maraso. Nkuko ku ngoma y’utuzu tw’abahutu kuba “Lunari”, “inyenzi”, “umwanzi wa Repubulika’’cg “inkotanyi” cyari ikirego gituma umututsi wese aho ari yaragombaga guhora yigengesereye, akaba (nkuko Antoine Mugesera yabivuze neza)[2] “ nk’umuja wiseseka mu rugo rutari urwe”, ni ko ku ngoma ya FPR Inkotanyi abahutu bategekwa kugenda bububa, uhawe umwanya akemera kuba igikingamuyaga, unyazwe agakoma yombi, ufunzwe agashinyiriza, uwiciwe agacira mu nda agaceceka.[3]
Iyi politiki y’ubwidishyi bwimakaza irondakoko aho ibera kirimbuzi ni uko abantu bagerageje kuyamagana batotezwa, abandi bakicwa, abandi bakameneshwa cg bagahimbirwa ibyaha by’urukozasoni nko kunyereza umutungo wa Leta cg guhungabanya umutekano w’igihugu. Ibi nanone birushaho kuzamba kuko abidishyi bari ku ngoma bagaragiwe n’inkomamashyi z’abatutsi n’abahutu b’ibikingamuyaga badashobora gutinyuka kubakebura ngo babagire inama amazi atari yarenga ikombe.
Nubwo abambali b’iyo ngoma bibeshyera ko bazakora ibishoboka ntihagire indi “revolution” iba[4], nta washidikanya ko igihuru gisa n’ikigiye kubyara igihunyira, dore ko ibijya gucika bica amarenga.
Ni ngombwa rero ko abakunda u Rwanda bahaguruka amazi atararenga inkombe, bakabuza urwo rwango kongera gusandara mu bantu ngo rugarike ingongo. Inzira yonyine ishobora kuvana u Rwanda muri urwo rwobo rw’inzika n’inzigo ni uguhindura ingiro n’ingendo y’ubutegetsi, hakajyaho ubutegetsi burengera bose kandi buhumuriza buri wese. Gushyiraho bene ubwo butegetsi bisaba ingamba zihamye n’inzira zibaza ubuhanga n’ubwitange. Ni byo tugiye kureba mu ngingo ikurikira.


IV. INZIRA Y’IBISUBIZO

“BYOSE BIBE BISHYA N’ISI IZABONE GUHINDUKA”

Imyiryane yokamye u Rwanda kuva rwabona ubwigenge iradusaba twe abariho none gusubiza amaso inyuma, tukareba aho tuvuye, aho turi n’aho tugana, hanyuma tugafata ingamba zo gutegura ejo hazaza. Kuraga abana bacu imivumo n’imiborogo ntabwo amasekuruza ataha yazabitubabarira.
Mu bintu byihutirwa kandi bishoboka dusabwa gutangamo umusanzu buri wese uko ashoboye, hariho inzira eshatu zuzuzanya: Kumva no gusesengura neza ishingiro ry’ubutegetsi bw’ubwidishyi; Kuvanaho ingoma y’ubwidishyi; Gushyiraho inzego zinogeye bose kandi zirengera buri wese; guhamya ubufanye mpuzamahanga bufitiye abaturarwanda n’abatuye isi yose akamaro.

1. Kumva no gusesengura neza ishingiro ry’ubutegetsi bw’ubwidishyi

U Rwanda rumaze imyaka iyinga mirongo itanu rwitwa Repubulika kandi bivugwa ko rugendera ku mahame ya Demikarasi. Repubulika (res publica mu kilatini) bivuga icyo abaturage bose bahuriyeho, basangiye, bafitemo amahirwe angana. Demokarasi bivuga , nkuko Perezida Lincoln w’Amerika yabigize ihame, “ubutegetsi bw’abaturage, butangwa n’abaturage, bukorera abaturage.” Ingingo twavuze haruguru zitwereka ko u Rwanda kugeza uyu munsi wa none rutigeze na rimwe, na rimwe ruba Repubulika, kandi n’ubwo rwagize amahirwe yo gusogongera ku mahame n’inzira za demokarasi, ntirwigeze rugira inzego za demokarasi. Reka twibukiranye:
U Rwanda rwabonye bwa mbere mu mateka yarwo amahirwe yo kuba Repubulika ubwo bake mu bayobozi batowe n’abaturage hirya no hino mu gihugu bahuriraga i Gitarama ku wa 28 Mutarama 1960 bakiyemeza kuvana u Rwanda mu maboko y’Umwami bagashyira ubuyobozi bwarwo mu maboko y’abaturage.
Nubwo Umwami n’abamushyigikiye batabyishimiye kandi imvururu zariho zikagira abo zibuza gutora no gutorwa uko bikwiye, Kamarampaka yo ku wa 25 Nzeli 1961 yabaye intambwe ya mbere yo guha abaturage amahirwe yo guhitamo ubuyobozi n’abayobozi bifuza. Ibyo byatumye amashyaka n’abayovozi batowe n’abaturage bashyiraho inzego zagejeje u Rwanda ku bwigenge. Icyaje gukurikiraho ni uko abari ku isonga y’iyo Repubulika batatiye amahame ya demokarasi :(i) bahohoteye abatarabatoye bamwe baricwa, abandi barameneshwa abandi bagirwa nk’ “umuja wiseseka mu rugo rutari urwe”; (ii) bahinduye Parmehutu ishyaka rimwe rukumbi kandi atari cyo abaturage bose bemeje; (iii) bageze aho bambura abaturage ububasha bwo gutora no kudatora uwo bashatse, (iv) ndetse bamwe mu bayobozi ba Parmehutu bagerageje kurwanya imikorere y’ubwikanyize bagirwa ibicibwa, bamburwa ku maherere imyanya batorewe na rubanda ku mugaragaro.
Repubulika ya kabiri yo yareruye inyaga abaturage uburenganzira bwo gutora no kudatora uwo bashatse, ibasigira ubwo kurangiza umuhango “bitondeka inyuma y’uwo Leta ishaka.”[5] Iyo migirire na nubu ni yo ikomeje, itandukaniro rikaba ko, aho kubishyira mu itegeko nko ku bwa Muvoma, FPR yo ihitamo kubikoresha ikinyoma, iterabwoba n’ubucancuro. Uwabonye amatora yo muri 2003 mu Rwanda kimwe n’abazi uko amatora akorwa mu nzego za FPR kuva aho Bwana Pawulo Kagame ayibereye Perezida bambera abagabo kuri iyi ngingo.
Nkuko twabivuze haruguru, U Rwanda rwavuye mu maboko y’akazu k’Umwami, rujya mu maboko y’akazu ka Kayibanda kikubiwe n’abahutu bo mu Nduga; buvamo bujya mu kazu ka Habyarimana kikubiwe n’Abahutu bo mu Bushiru, none ubu rugeze mu kazu ka Kagame gashingiye ku batutsi biganjemo abasilikali bavuye Uganda. Ngiyo Repubulika y’u Rwanda dufite uyu munsi.
Mu rwego rwo gushaka ibisubizo, tugomba kubanza kwibuka ko kugira ubutegetsi bw’akazu bwitirirwa abaturage atari umwihariko w’u Rwanda yewe ndetse si n’umwihariko w’Afurika cyangwa ibihugu bikennye nkuko abazungu bamwe bakunze kubyamamaza. Mu byukuri, ubutegetsi bw’akazu buri muri kamere y’ubutegetsi bwose aho buva bukagera. Abahanga mu bya politiki bagira bati :

Power tends to corrupt; absolute power corrupts absolutely.
Le pouvoir tend à corrompre; tout pouvoir absolu corrompt absolument.

Ni ukuvuga ngo “ni kamere y’ubutegetsi bwose kwikubirwa n’ababufite, umutegetsi utagira ikimukoma imbere ategekesha igitugu”.
Ingero ku isi hose zishyigikira iri hame ni ititi n’agasani: Kayizari mu Baromani; Ludoviko wa XIV na Bonaparte mu Bufaransa; Hitler mu Budage; Musolini mu Butaliyani; Franco muri Espagne; Staline muri Rusiya; Pinochet muri Chili; Mobutu muri Zayire; Idi Amini mu Buganda, …
Ibi rero bivuga ko ibihugu icyo birushanya muri Demokarasi atari ukugira abayobozi beza, icyo birushanya ni uburyo bwo kubuza abategetsi bariho kwikubira ubutegetsi no gukoresha igitugu n’iterabwoba. Inzego nk’Inteko ishinga amategeko, ubucamanza, amashyaka ahanganye na Leta, imiryango itegamiye Leta, ibinyamakuru byigenga, … umurimo wabyo ni ukubuza abategetsi bariho kuba ibinani. Iyo izo nzego zigaruriwe n’akazu kari ku butegetsi, byanze bikunze umuyobozi w’igihugu aba umwidishyi, agakikizwa n’inkomamashyi n’ibikingamuyaga, akica agakiza, abaturage bakaba nk’abaja mu gihugu cyabo.
Bene ubu butegetsi buri gihe bushaka impamvu bugira igikangisho, bugahitamo itsinda ry’abantu bugira ruvumwa kubera ibyo bamwe muri ryo bakoze cg bitirirwa, kurwanya abo bantu, kubatoteza, kubahimbira ibirego no kwamagana ushobora kubavugira akaba ari byo biba gahunda y’inzego zose za Leta. Nguko uko Repubulika ya mbere n’iya kabiri zamaze imyaka zigisha ko abatutsi ari babi muri kamere yabo, ko batanyurzwa, ko bahora barota ibyo gusubiza abahutu ku ngoyi ya cyami. Nguko uko FPR yirirwa yamamaza ko abahutu bose bavukanye umugambi wo kwica abatutsi, ko bahora bawuhembera kandi ko umunsi hagize umuhutu ujya ku butegetsi atari igikingamuyaga cya FPR abatutsi bose bazashira.
Kubohora U Rwanda iyo ngoyi y’ubwoba na gatebe gatoki y’akarengane bisaba kurandura umuco w'ubwikanyize; hakajyaho ingamba zose zo gukumira abayobozi bashya ngo batigira ibinani by’abidishyi. Dukurikije ibibazo u Rwanda rurimo, guhagarika ubwidishyi buriho ni yo ntambwe ya mbere yo gukemura ibibazo by’umwiryane.

2. Kuvanaho ingoma y’ubwidishyi

Hariho inzira inyinshi zo kuvanaho ingoma y’ubwidishyi, ariko iz’ingenzi zishoboka imwe yonyine cg zikomatanijwe ni 5.

1° Kwivugurura kw’ingoma ubwayo
Inzira yoroshye, yifuzwa na benshi kandi irusha izindi kugirira igihugu cyose akamaro, uretse ko ikomerera abari ku butegetsi kurusha “kwinjiza inzovu mu mwenge w’urushinge”, ni uko abari ku ngoma ubwabo bafata icyemezo cyo kureka imikorere y’ubwidishyi, bagasubiza ubutegetsi mu maboko y’abaturage. Bashobora kubikora babyibwirije ubwabo; bashobora kubikora babigiriwemo inama n’amahanga y’inshuti zabo cg z’igihugu; bashobora nanone kubikora bokejwe igitutu n’abarwanya ubutegetsi.
Urugero rurangiranwa ni urw’ingoma ya Gashakabuhake muri Afurika y’epfo aho akazu k’abazungu kemeye kuva ku izima, kemera ko habaho amatora anyuze mu mucyo mu 1994, kemera gutsindwa no gutanga ubutegetsi hatabaye imvururu zisenya igihugu. Izindi ngero nziza zabaye muri Pologne mu 1989, Benin muri za 90 ndetse na Kenya muri 2002 aho leta zariho zagiye zemera amatora azira uburiganya zigatsindwa mu mucyo. Ingero mbi zabaye i Burundi muri 1993 na Nigeria muri 1996 aho utuzu twari ku butegetsi twemeye gukoresha amatora azira uburiganya twayatsindwa abasilikali bo mu kazu bakabyanga bagashora igihugu mu mvururu z’mivu y’amaraso.

2° Kwitandukanya n’akazu no guhirika ingoma y’ubwidishyi
Ubundi buryo bushoboka kandi bugirira igihugu akamaro ni uko bamwe bu bagize akazu kari ku butegetsi basanga ibyo gakora bigayitse bakiyemeza kwitandukanya n’Umwidishyi mukuru, bakamukuraho bagasubiza ubutegetsi mu maboko y’abaturage. Ibi kenshi bikorwa na bamwe mu bakuru b'ingabo z’igihugu, babyibwirije, babigiriwemo inama, babifashijwe n’amahanga, cg se babifatanije n’abarwanya Leta. Urugero rwiza ruzwi cyane ni urwa Mali aho uwali umukuru w’Ingabo, Tumani Touré yavanyeho ubutegetsi bw’igitugu ubwe yari arimo agashyiraho Leta y'inzibacyuho yahaye abaturage urubuga rwo kwitorera mu mucyo abayobozi n'inzego nshya bifuza.

3° Gufata ubutegetsi ku ngufu kw’abarwanya ubutegetsi
Iyo ubutegetsi butivuguruye ubwabwo cg ngo buvanweho na bamwe mu
babugize, indi nzira ikunze gukoreshwa ni uko abarwanya ubutegetsi bavanaho leta iriho ku ngufu. Bashobora kubikora bakoresheje udutsiko twabigize umwuga (mercenaires), cg bakoresheje intambara yihuse (guerre -éclair) cg y’inyeshyamba.
Icyo umuntu yakwibutsa muri rusange, ni uko iyi nzira iyo ihubukiwe idakunze kugirira abaturage akamaro. Kenshi abafashe ubutegetsi ku ngufu bashaka kwihemba, bityo bakongera kurema akazu k’ubwidishyi. Urugero rutari kure ni urwa FPR nkuko twabigaragaje hejuru aha. Indi nenge ikunze kugaragara ni uko abarwanya ubutegetsi n’ababufite bagwa miswi abaturage bakaba mu cyeragati nkuko byagenze muri Angola irwana na Savimbi cg Sudani irwana n’ingabo za Galang. Haba n’ubwo bene izo ntambara ziba intandaro yo kugabiza igihugu abacancuro b’abanyamahanga n’imitwe y’ibyihebe nkuko byagenze mu ntambara yahiritse Mobutu muri Zayire igahindura igihugu ingaruzwamuheto y’ingabo z’amahanga n’imitwe itabarika y’inyeshyamba.
Kugira ngo iyi nzira igire akamaro, bisaba ko abafashe intwaro zo kurwanya akazu kari ku butegetsi baba koko bashyigikiwe n’abaturage bo mu moko n’uturere tunyuranye kandi imiryango itegamiye Leta nk’amashyirahamwe, za Kiliziya n’ibinyamakuru byigenga bikagiramo uruhare rugaragara. Rumwe mu ngero nke nziza zamamaye ni urw’ingabo z’abaturage zibumbiye mu mutwe wa Sandinista zafashe ubutegetsi muri Nicaragua muri 1979 zigashyiraho ubutegetsi bushinze imizi muri rubanda kandi bushyigikiwe na za Kiliziya n’andi mashyirahamwe yita ku bibazo by’abaturage.

4° Imyivumbagatanyo y’abaturage
Iyo abaturage bakomeje gucurwa bufuni na buhoro bakabura gitabara, hari aho bagera kwihangana no kugira ubwoba bigasimburwa no kwiheba. Icyo gihe barivumbura, bagahangana n’ubutegetsi ku mugaragaro kugeza babuhiritse. Urugero rwamamaye ni urwo muri Rumaniya aho abaturage bivumbuye bagakwira imihanda yose, abasilikari bakabarasa bikaba iby’ubusa. Abasilikari benshi bageze aho banga gukomeza kurwanira ubutegetsi bukandamiza ababyeyi n’abavandimwe babo, nuko ahubwo bafasha abaturage batera ingoro ya Perezida Cheocheskou baramushwanyaguza n’ibyegera bye. Ubu Rumaniya iri mu bihugu biri ku isonga mu byateye imbere muri demokarasi.

5° Ibitero by’amahanga
Indi nzira ishoboka ni uko ubutegetsi bw’ikinani bwigira akaraha-kajya-he bukagirira nabi abaturage babwo ndetse n’abaturanyi ku buryo bitera amahanga guhaguruka agatabara. Iyi nzira ikunze gutera ingorane kuko kenshi amahanga atabara kubera inyungu bwite yifitiye kurusha impuhwe afitiye abaturage bahohoterwa.
Urugero rw’agatereranzamba ni Iraq aho Amerika yateye igahirika ikinani Sadamu Huseni ariko na nubu kuhagarura umutekano bikaba byarananiranye. Urundi rugero rwa kera ni urwa Tanzaniya yateye Uganda igahirika Idi Amin Dada wari warigize ikigirwamana. Ibi kandi byabaye muri Haiti na Panama aho ingabo z’Amerika zateye zikirukana ubutegetsi bw’igitugu.

Muri rusange, hariho inzira zinyuranye zo kunyaga utuzu tw’abidishyi ubutegetsi, buri yose ikagira akamaro bitewe n’abayikoresha n’uruhare baha abaturage mu guhindura ubutegetsi no kugenzura imikorere y’ubutegetsi bushya. Koko rero, kuvanaho ingoma y’abidishyi ni intambwe ya mbere yo gukemura ibibazo, ariko ntihagije. Gushyiraho ubutegetsi bubereye abaturage ni yo ntambwe ikunze kuba ingorabahizi.

Gushyiraho inzego zinogeye bose kandi zirengera buri wese
Kugira ngo ihinduka ry’ubutegetsi rigirire abaturage bose akamaro muri rusange kandi igihugu ntikibe ingaruzwamuheto y’akazu gashya kagira abo gatoteza cg gaheza ku maherere, hagomba kubaho ingamba zihamye zo gushyiraho inzego zinogeye bose kandi zirengera buri wese. Mu gihugu nk’u Rwanda cyakunze kurangwa n’imyiryane ikabije, hari ibintu bitatu by’ingenzi bigomba kwitabwaho: gutanga ihumure ku baturage bose; komora ibikomere; kurwanya ubukene no gusaranganya umutungo w’igihugu.

- Gutanga ihumure
Abanyarwanda bagira bati “uwakanzwe n’iyera abona iyirabura agahunga.” Kubera akarengane gakabije kandi kagambiriwe utuzu tw’abahutu n’utw’abatutsi twagiye tugirira abanyarwanda tubaziza ubwoko cg akarere bavukamo, birakomeye guha abanyarwanda bose icyizere cyo kuzagira ubutegetsi butabarenganya, butabahora icyo bari cyo, bubaha amahirwe angana kandi bubarengera uko bikwiye. Ikibabaje kuruta byose ni uko utwo tuzu dukora uko dushoboye ngo dusige abo mu bwoko dukomokamo icyasha cy’urugomo rukorera abandi banyarwanda, ibyo bikaba intandaro yo gutotezwa n’ingoma nshya. Iyo gatebe-gatoki y’inzigo zidashira ni yo ubu u Rwanda rwivurugutamo: abagize umugambi mubisha wo kumara abatutsi basize icyo cyasha abahutu bose, none FPR ikoresheje igisilikali, amagereza na Gacaca zirenganya ndetse n’amashyirahamwe yitwa ko yigenga nka IBUKA, iragereka akarengane igirira abahutu ku batutsi bose n’abacitse ku icumu by’umwihariko.
Nkuko abahutu bamwe batunguwe n’itsindwa ry’Inzirabwoba bibwiraga ko zibarinze, ubu abatutsi batari bake bahora mu cyoba ko ingabo z’Inkotanyi zagira uzitsinsura, kuko Leta iriho ivuga ko abatutsi aho bava bakagera akabo kaba gashobotse. Ni ngombwa rero ko haboneka uburyo bwo guhumuriza abaturage bose, mu bwoko n’akarere aka ari ko kose, baba ari abari mu butegetsi ubu, baba ari ababurwanya n’abo bwagiriye nabi, buri wese akumva ko adashobora kurengana.
By’umwihariko, kuba abatutsi batinya “demokarasi ya nyamwinshi” abahutu bakunze gushyira imbere, abatutsi benshi kandi bakaba bateze amizero yabo ku gisilikali ubu kiganjemo abatutsi, birasaba gushyiraho ingabo z’igihugu zihumuriza impande zose, kandi amatora agakorwa ku buryo yubahiriza ibyifuzo bya benshi ariko atirengagije inyungu za bake.
Inkuru nziza ni uko u Rwanda atari cyo gihugu cya mbere cyaranzwe n’urwikekwe n’imyiryane mu baturage. Kuba ibihugu nka Afurika y’epfo, Ubusuwisi, Ububiligi… byarashoboye gushyiraho inzego zihuza kandi zigahumuliza abaturage babyo bose, ni gihamya ko igihe cyose hari ubushake n’ubushishozi, gutanga ihumure mu Rwanda birashoboka.

- Komora ibikomere
Gutanga ihumure bijyana no komora ibikomere. Koko rero abanyarwanda bafite ibikomere byinshi kandi binyuranye. Hari iby’akarengane ka kera . Hari n’ibya vuba aha birimo iby’intambara ya 90 n’amahano yayikurikiye arimo itsembabwoko ry’abatutsi, itikizwa ry’abahutu n’urundi rugomo runyuranye. Ibyo bikomere hari ibyo Leta iriho n’amahanga bemera bagafata mu mugongo abahohotewe, hari n’ibyo Leta izinzika ndetse ikabuza bene byo gutaka no kwibuka ababo mu ruhame.
Komora ibyo bikomere bisaba ibintu byinshi birmo byibura bitatu by’ingenzi:
a- Kumenya ukuri ku byabaye
b- Guha impozamarira no gufata mu mugongo abarokotse
c- Guhana no gutanga imbabazi
Kumenya ukuri ku byabaye bisaba kubona urubuga rwigenga rwo gucukumbura, gukusanya no gusesengura ibyaha by’urugomo n’ubugome mburabuntu byabaye mu Rwanda cyane cyane guhera 1990 kugeza ubu.
Gutanga impozamarira bisaba kumenya abazize n’abasizwe iheruheru n’ubwo bugizi bwa nabi, abantu bose bagahabwa amahirwe angana yo kuvuga akababaro kabo, kuririra no kunamira ababo, bagahabwa ikimenyetso cy’impozamarira mu izina ry’igihugu n’abaturage bose kandi Leta n’amahanga bagafatanya guhumuliza abahohotewe ko ibyababayeho bitazasubira ukundi.
Guhana no gutanga imbabazi byo bisaba ko abagize uruhare urwo ari rwo rwose muri ayo mahano bamenyekana, bagahabwa urubuga rusesuye rwo kwiregura, abere bakarenganurwa kandi bagasubizwa ishema n’icyubahiro bakwiye, abasabye imbabazi bagahabwa amahirwe yo kwicuza no gutanga umusanzu wabo mu gusana imitima n’igihugu, ku bagitsimbaraye ku bugome bwabo hagafatwa ingamba zihamye zo kubahana no kubaha amahirwe yo kuva I buzimu bakajya i buntu.

- Kurwanya ubukene no gusaranganya umutungo w’igihugu
Guhumuriza abaturage no komora ibikomere bigomba kujyana nanone no gushyiraho gahunda zihutirwa zo guha abaturage amahirwe angana yo kugira agaciro n’uruhare rugaragara mu buzima bw’igihugu cyabo. Kugira ngo ibyo bigerweho, ni ngombwa kwibuka ko akarengane n’amarorerwa igihugu cyanyuzemo byateye ubusumbane bukabije, bamwe bagakizwa n’ibyo bataruhiye, abandi bagatindahara. Kurwanya ubukene no gusaranganya umutungo w’igihugu ku buryo bunyuze mu mucyo kandi bushyize mu gaciro bigomba kuba inshingano y’ubutegetsi bushya mu nzego zose.

4. Ubufatanye mpuzamahanga
Ngo usenya urwe umuitiza umuhoro. Iyo ntero ni yo yabaye inyikirizo mu mahanga mu bibazo byose u Rwanda rwagize. Aho gufasha abaturage kwigobotora ingoyi y’imyiryane n’ubukene, amahanga yagiye arangwa no kubogamira ku tuzu tw’ubwidishyi dufite cg dushaka gufata ubutegetsi. Ni mu gihe kandi kuko ayo mahanga kenshi aba afite inyungu zayo mu gufasha utwo tuzu gufata cg gukomeza ubutegetsi.

(i) Politiki ya Mpatsibihugu
Ñ Abakoloni b’abadage bagobotse ingoma ya cyami ubwo yari imaze gushegeshwa n’amakimbirane yaturikiye ku Rucunshu, batiza amaboko akazu gashya kiganjemo abega b’abakagara, bahashya abigomekaga nka Rukara na Basebya, ndetse bomeka ku Rwanda intara zitari zarigeze zitsindwa nk’Igisaka na tumwe mu turere tw’amajyaruguru no mu Kinyaga;

Ñ Ababilig bakomeje iyo nzira bagerekaho akarusho ko gushyiraho amashuri yihariye y’abana b’abatware bityo begurira imfura z’abatutsi ubutegetsi bwa Kizungu n’ubwa Kinyarwanda.

Ñ Mu myaka ya za 1950, Ababiligi bafashije abahutu kumvikanisha akarengane kabo, aho Parmehutu ifatiye ubutegetsi barabusangira kandi bafatanya n’urugamba rwo guhashya Lunari no gukandamiza gatutsi.

Ñ Habyarimana afashe ubutegetsi yisunze Ubufaransa bumufasha gukomeza igitugu cya gisilikali no gutsimbaza ishyaka rimwe Muvoma.

Ñ Mu gutera u Rwanda no gufata ubutegetsi ku ngufu, FPR yisunze cyane Amerika n’Ubwongereza ari nabo na nubu bagikomeza kuyikingira ikibaba ku byaha ikurikiranyweho.

Ñ Muri ibyo byose, Loni yagiye iba nyamujya-iyo-bigiye, ikamenya ko nyirinkota ari uyifashe akarumyo. Nikozitambirwa si umunyarwanda gusa. Uko zivuze , Loni kugeza uyu munsi ni ko izitambira.

(ii) Ibihugu by’abaturanyi
Umubano w’u Rwanda n’ibihugu birukikije wo ahanini waranzwe n’urwikekwe rutuma abaturage badashyikirana neza. U Burundi bwaranzwe ahanini no kuba ikinyuranyo cy’u Rwanda kugeza uyu munsi: Iyo abahutu bimye i Kigali, Bujumbura yimika abatutsi ukagira ngo biri mu masezerano. Iyo i Kigali bavuze iby’amoko ku mugaragaro (Habyarimana n’iringaniza), i Bujumbura barabyamagana (Bagaza akuraho ubwoko mu karangamuntu), i Bujumbura bakwemera kuganira ku by’amoko (amasezerano y’Arusha), i Kigali bakarahira batsemba ko nta moko abaho.
Umubano mwiza u Rwanda rwigeze ni uwo rwagiranye na Zayire, ariko kugirana umubano n’umutegetsi w’Ikinani nka Mobutu ukenesha abaturage be nta musaruro ugaragara abanyarwanda bari kuwutegamo. Umubano wo kubeshyana na Uganda wabyaye intambara y’Inkotanyi.
Kubeshyerwa ko u Rwanda ari igihugu kivuga igifaransa byatumye rugira imigenderanire mike n’ibihugu byo bu burasirazuba, aho twinjirijwe mu bavuga icyongereza, ubwishishanye burakomeza kuko igitugu cyahawe intebe iwacu kibangamiwe n’intambwe ya demokarasi igenda igerwaho muri Kenya na Tanzaniya. Magingo aya, amizero tuyateze ku izuka rya CPGL na EAC tutaramenya neza ibyayo.
Muri make, kubaka u Rwanda rubereye abanyarwanda bose birasaba kuvugurura ububanyi n’amahanga duhereye ku bihugu duturanye, tugafatanya kubaka inzego zihamye za demokarasi, tugaha abaturage ubwisanzure bwo guhahirana no kuzuzanya ndetse no gukora imirimo mu gihugu cy’abaturanyi nta nkomyi. Iyi ni yo nzira yadufasha gukemura ibibazo by’ubushotoranyi dufitanye na Kongo, bigaha n’abaturage ba Kongo bafite inkomoko mu Rwanda ubwisanzure mu rwego rwagutse rw’akarere.
U Rwanda rugomba kureka imikino mibi yo guhora rushaka mpatsibihugu rwiyomekaho, rukabana n’ibihugu byose dushingiye ku nyungu n’akamaro bifitiye abaturage bacu. Imiryango ivuga igifaransa cg icyongereza, iy’amajyepfo, i burasirazuba cg amajyaruguru, U Rwanda rugomba kuyijyamo rutagombye gutegekwa kugira iyo ruvamo kubera inyungu z’utuzu. Umubano w’u Rwanda na Loni ugomba kuvugururwa ugashingira mbere na mbere kudufasha guhumuliza abaturage cyane cyane mu ntambwe za mbere z’urugendo rwo kuva ku ngoma y’ubwidishyi tugana demokarasi.
Aho inzira yo gusubiza ubutegetsi mu maboko y’abaturage izaturuka hose, Loni n’umuryango w’ubumwe bw’Afurika kimwe n’ibihugu by’inshuti z’u Rwanda n’indi miryango mpuzamahanga bigomba kugira uruhare rugaragara mu guhuza abanyarwanda b’ingeri zose mu biganiro binyuze mu mucyo, kurinda umutekano w’abaturage bose, kuvugurura no kurema ingabo nshya z’igihugu, kubuza ko hari akazu kakongera kugira igihugu ingaruzwamuheto, kuburizamo ibikorwa byo guheza no guhora, gufatanya mu gukurikirana no guhana abakekwaho uruhare mu mahano yoretse u Rwanda, gutanga impozamarira ku barokotse no kubaka ubukungu n’ibikorwa by’amajyambere arambye.

UMWANZURO
U Rwanda ruri mu mayirabiri. Imyiryane yarubayemo akarande yerekanye ko nta bwoko, nta karere cg irindi tsinda ry’abantu rifite umwihariko wo gukandamiza abandi bizira iherezo, cg gukunda igihugu no kukitangira kurusha abandi.
Nubwo bikunze kuvugwa ko igihugu cyoretswe no kugira abayobozi babi, ubwo bubi ndetse bukitirirwa amoko (abatutsi cg abahutu), inyoko-muzi (abega, abanyiginya), uturere (Kiga, nduga) cg igice cy’abanyarwanda akazu kubakiyeho (igisilikali, abavuye Uganda), mu by’ukuri amateka atwereka ko nta muyobozi n’umwe uba yaravukiye kuba mwiza cg mubi.Wa mugani wa Rousseau, umuntu wese agirwa mubi cg mwiza n’abo abana nabo.
Ku by’ubuyobozi by’umwihariko, ihame ni uko ubuyobozi bwose buryoha, ubufite akaba atifuza kuburekura. Icyo ibihugu byateye imbere muri demokarasi birusha ibindi, ni ugushyiraho inzego n’ingamba zihamye zituma uri ku buyobozi atabugira akarima ke. Ibi rero bigomba gusobanuka ko ari ingoma ya cyami, ari iya Parmehutu, iya Muvoma se cg iy’Inkotanyi, zose ibibi zakoze ntibyatewe n’uko ari mbi muri kamere yazo cg kamere y’abazigize, impamvu nyakuri ni uko zitegeze zigira uzikoma imbere, zigashobora gucecekesha abagerageje guhangana na zo abandi zikabagira ibikingamuyaga, zikagira igihugu ingaruzwamuheto amahanga akinumira, cg se akabatiza umurindi.
Guhindura ibyo byose bisaba ikintu kimwe k’ingenzi: gushyiraho inzego zibuza ubuyobozi bukuru kuba Ibinani kandi abaturage bagahabwa uburenganzira busesuye bwo guhora bahitamo ababahagarariye bifuza, bagasezerera uwo badashaka, kandi bakagenzura imikorere ya Leta yabo bashingiye ku mahame mpuzamahanga n’amategeko n’umuco mwiza w’u Rwanda.
Intambwe ya mbere mu Rwanda rw’iki gihe ni ugufasha ubuyobozi bwa FPR
gusubiza ubutegetsi mu maboko y’abaturage. Ibyo bitashoboka ku neza, FPR ikabihatirwa, ibyo byakwanga, abanyarwanda ubwabo n’inshuti z’u Rwanda bagafata ingamba zo kunyaga FPR ubutetsi yihaye bakabusubiza mu maboko y’abaturage.
Uyu ni wo mugambi nyamukuru uwifuriza u Rwanda amahoro agomba gushyira ku mutima. Iyi ni yo nshingano igomba kuraza ishinga abifuza kuzaraga abana babo u Rwanda rutarimo imivumo.
Twese biratureba kandi twese tubifitemo inyungu. Barahirwa abanyarwanda bazusa iki kivi kidutegereje twese cyo gushyira ubutegetsi bw’u Rwanda mu maboko y’abaturage. Barahirwa kurushaho abana bazavuka basanga iby’iyi myiryane twivurugutamo ari inkuru ishaje, bakajya babyumva mu migani n’amateka nkuko abanyaburayi b’iki gihe babwirwa iby’intambara ya kabiri y’isi yose.

Imana y’i Rwanda ikomeze irugende imbere ibuze uduhutu ncancama n’udututsi nzingiza kuzarwiranguza.

[1] Noheli Twagiramungu ni impuguke mu by’umuco n’amateka y’u Rwanda, uburenganzira bw’ikiremwamuntu no gukemura amakimbirane. Ubu ni umushakashatsi muri Kaminuza ya Tufts muri Amerika aho ari gukorera impamyabushobozi y’ikirenga mu by’ububanyi n’amahanga n’iterambere mpuzamanga.
[2] Antoine Mugesera, Imibereho y’abatutsi kuri repubulika ya mbere n’iya kabiri (1959-1990). Les Editions rwandaises. Kigali, 2004.
[3] Minisitiri Muligande Karori mu minsi ishize yashinyaguriye abacitse ku icumu abitirira ubutegetsi badafite, maze asobanura ko abafite ubutegetsi ubu ari akarima kabo; abategekwa nabo bakaba bagomba kubyemera gutyo; naho abavutse mu bwoko bwica ibyo gutegeka bakaba bagomba kubyibagirwa.
[4] Ibi perezida yabivuze yizihiza isaburu ya 13 y’intsinzi ye
[5] Gasimba Saveri, Indege y’ubumw Rwanda rw’ubu. Kigali, 1999