Agence Hirondelle d'information, de documentation et de formation, Arusha (Tanzanie): News
19.12.05
TPIR/DEFENSE - LES PRINCIPAUX ACCUSES DU TPIR SEMBLENT MENER UNE BATAILLE POLITIQUE PLUTOT QUE JUDICIAIRE (PAPIER D'ANGLE)
Arusha, 19 décembre 2005 (FH) - Déjà condamnés par l’opinion internationale et ne se faisant guère d’illusion sur leur sort au terme de leurs procès, les principaux accusés en jugement devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) semblent avoir renoncé à une défense judiciaire proprement dite au profit d’un baroud d’honneur politique contre l’actuel gouvernement rwandais. Pour eux, l’essentiel n’est pas tant de réfuter, par des contre-preuves, les accusations du procureur que d’intenter un procès au Front patriotique rwandais (FPR) qu’ils accusent d’avoir attaqué leur pays en octobre 1990 et mis le feu aux poudres en avril 1994.
L’ex-directeur de cabinet au ministère de la défense, le colonel Théoneste Bagosora et l’ancienne ministre de la famille et de la promotion féminine, Pauline Nyiramasuhuko, qui présentent leur défense et ont terminé leurs témoignages en novembre ont illustré plus que tout autre ce nouveau choix, reprenant souvent des slogans politiques utilisés par le pouvoir d’octobre 1990 à juillet 1994 pour mobiliser les Hutus. Ils se sont faits les porte-drapeaux de l’opposition hutue rwandaise en exil.
«Les Inyenzi des années 1960 et le FPR de 1990 avaient le même objectif: revenir au Rwanda pour prendre le pouvoir, tout le pouvoir», a notamment déclaré Bagosora.
«Le système de gouvernement du FPR, a-t-il poursuivi, est pire qu’un régime monarchique. Le FPR a instauré un régime qui gouverne comme avant 1959, un régime monarchiste sous une robe républicaine. Un gouvernement sans partage où le Tutsi doit éliminer le Hutu».
L’ancien directeur de cabinet n’a même pas épargné le tribunal devant lequel il comparaît, lui reprochant d’avoir décidé délibérément de ne pas poursuivre le FPR : «le tribunal ne juge que les Hutus vaincus, le FPR vainqueur, on n’y touche pas», a-t-il dit.
Le procureur en chef, le Gambien Hassan Bubacar Jallow, n’étant pas dans le prétoire, Bagosora s’en est pris à son substitut Drew White (Canada) et aux juges leur reprochant de ne pas enquêter sur l’assassinat du président Juvénal Habyarimana.
«Vous n’êtes pas le seul responsable de ça», a-t-il dit, tournant de grands yeux vers White. «Même la chambre aurait dû ordonner cette enquête. C’est ridicule parce que maintenant, on sait ce qui s’est passé», a-t-il poursuivi avant de se demander si «les Américains accepteront la publication du rapport (du juge français Jean-Louis) Bruguière».
«Il est impossible de défendre Bagosora sans poser de problèmes politiques», explique Me Raphaël Constant, le conseil principal de Bagosora. Le TPIR «est une juridiction créée par un organe politique, une juridiction qui a une portée politique et un choix politique», estime cet avocat français pour qui faire le procès du FPR fait absolument partie de la stratégie de défense du présumé «cerveau» du génocide. C’est le même discours politique qu’a tenu Nyiramasuhuko devant une autre chambre.
«Il y a une organisation appelée FPR qui a pris le pouvoir par la force et qui l’exerce sans partage. Cette organisation a causé des massacres au Rwanda, aucun Rwandais n’a accepté cela. Cette organisation a atteint son objectif par la force et terrorise tous les Rwandais de l’intérieur et les réfugiés comme nous et d’autres qui fuient encore», a-t-elle déclaré à la fin de son témoignage, sans exprimer la moindre pensée pour les victimes. Pendant les deux mois qu’a duré son témoignage, elle a bataillé sans cesse contre le nouveau pouvoir rwandais, se conformant à une stratégie chère à son avocate canadienne, Nicole Bergevin.
Le représentant du gouvernement rwandais auprès du tribunal, Aloys Mutabingwa, qui assiste parfois à des audiences s’indigne : «ils utilisent le langage qui a poussé au génocide. Un tel langage a encore un impact au Rwanda. Se défendre n’est pas un prétexte pour ressusciter la RTLM. Le TPIR doit éviter de servir de tribune à ce genre de langage, cela n’a rien à voir avec les faits qui leur sont reprochés. C’est la propagande du génocide», estime le jeune diplomate. Selon lui, les avocats devraient «être professionnels et non propagandistes, ne pas se cacher derrière les droits de la défense pour faire de la propagande».
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